Mois de Février / sommaire des chroniques / sommaire de Camilist

Chroniques du 9 février.

Sommaire :

1587

L’exécution de Marie Stuart, reine d’Angleterre.

Après la promulgation des Trente-Neuf Articles (protestants presbytériens), les catholiques anglais s’étaient tournés vers Marie Stuart, rentrée en Écosse après la mort de François II en 1560. Mais cette reine est, elle aussi, aux prises avec de graves problèmes. John Knox vient de faire triompher en Écosse la réforme presbytérienne. Marie Stuart, restée catholique, doit gouverner un peuple turbulent et fanatisé.

Frivole et imprudente, elle a épousé, en deuxièmes noces, Darnley, grand seigneur taré, bientôt assassiné dans des circonstances troubles ; puis elle s’est éprise du brutal Bothwell, principal responsable du meurtre. Cette union aliéna aussitôt l'aristocratie écossaise à la reine. Elle réunit une armée qui (même si elle était égale en nombre à l'armée confédérée) manqua nettement de discipline et fut défaite à Carberry Hill le 15 juin 1567. Marie dut alors abandonner Bothwell et se rendre aux confédérés.

En juillet, elle abdiqua en faveur de son fils Jacques VI, couronné cinq jours plus tard à Stirling. Évadée de sa prison insulaire de Lochleven (2 mai 1568), elle rassembla en quelques jours une armée de 6 000 hommes. Mais cette armée fut écrasée le 12 mai à Langside, près de Glasgow, par le régent Murray.

Malgré les conseils de ses amis, elle traversa le Solway Firth et se réfugia à la cour de la reine d'Angleterre Élisabeth Ire, où elle resta prisonnière pendant dix-huit ans. La méfiance d'Élisabeth était fondée, puisque le parti catholique se regroupait derrière Mary pour en faire sa rivale politique et religieuse.

En effet, l’existence de Marie Stuart – autour de laquelle des intrigues s’ourdissent continuellement – n’est pas sans dangers pour Élisabeth, d’autant plus que la reine d’Écosse n’a jamais renoncé à ses droits de succession. Aussi sa présence en Angleterre éveille-t-elle les espoirs des catholiques, et suscite deux complots (1569, 1572) suivis de troubles, dont le but était le renversement d’Élisabeth.

Parmi les tentatives pour la délivrer et la faire parvenir au trône d'Angleterre, la plus célèbre fut celle de son page Anthony Babington, qui complota l'assassinat d'Élisabeth Ire. Cette conspiration entraîna son procès et sa condamnation à mort en octobre 1586. Élisabeth Ire attendit cependant jusqu'au 1er février 1587 pour signer l'acte d'exécution qui a lieu le 9 février 1587.

1792

L’Assemblée législative française réussit à faire confier les biens des immigrés à la Nation.

À la veille de la Révolution française, l’Église possède un patrimoine foncier étendu et souvent mal entretenu ; on l’estime suivant les régions à une moyenne oscillant de un dixième à un cinquième du territoire. Dès le 2 novembre 1789, la Constituante, placée devant une situation financière difficile, décrète que les biens du clergé sont à la disposition de la nation ; celle-ci, en contrepartie, prend à sa charge les frais du culte, l’entretien de ses ministres et l’assistance aux pauvres. Cette mesure de sécularisation n’est d’ailleurs pas nouvelle. Une conception traditionnelle mettait à la disposition du roi le patrimoine ecclésiastique dans les périodes critiques. De plus, les économistes critiquent l’existence des trop grandes propriétés et leur mauvaise gestion.

Après la décision de principe de la Constituante, il reste à passer à l’application, c’est-à-dire à la vente des biens confisqués. La quantité est si importante qu’on n’ose pas les mettre en bloc sur le marché. On procède graduellement. On met d’abord en vente une partie jusqu’à concurrence d’une somme de 400 millions : il s’agit en effet de garantir une première émission d’assignats destinés à rembourser des dettes publiques exigibles. Dès le début, la question des biens nationaux est donc liée au sort des assignats.

L’Assemblée décide enfin, par décrets de juin et juillet 1790, la mise en vente de la totalité des biens.

Les biens nationaux de deuxième origine (des immigrés) sont plus difficiles à évaluer. Les biens des émigrés ou des condamnés sont en majorité des propriétés de nobles, leur confiscation est une mesure qui a peu de précédents, et dont les motifs sont autant passionnels que financiers. C’est seulement le 9 février 1792 que l’Assemblée législative réussit à faire passer un décret confiant les biens des émigrés à la nation ; le 27 juillet suivant, la vente des immeubles comme des meubles est décidée. Mais à cette date deux conceptions s’affrontent. Pour les modérés, soutenus par les économistes, il s’agit de diviser les grandes propriétés sans aboutir à un morcellement excessif, préjudiciable à une bonne exploitation, et d’obtenir rapidement des rentrées d’argent permettant de soutenir ou de résorber les émissions d’assignats. Les révolutionnaires désirent, au contraire, opérer une meilleure répartition du sol entre tous les habitants, avec l’octroi de longs délais de paiement.

Il en résulte une série de mesures contradictoires : suppression des ventes aux enchères qui donne naissance à des spéculations effrénées. Le Directoire, en face d’une situation catastrophique, fait voter la loi du 28 ventôse an IV (18 mars 1796) : les assignats sont supprimés et remplacés par des mandats territoriaux emportant hypothèques sur les biens nationaux.

Les ventes se font alors par masses importantes, sans enchères, en prenant comme base les baux de 1790. Devant ce gaspillage du domaine à des prix très bas, les enchères sont rétablies dès les mois suivants.

Le Concordat en 1801, la remise en 1814 des biens non vendus aux anciens émigrés, enfin, la loi du 27 avril 1825, dite du milliard des émigrés, parce qu’elle donnait un milliard d’indemnités aux émigrés, viennent consolider toutes les aliénations.

Le résultat de ces mesures est certainement un vaste transfert de propriété. Mais il est difficile de préciser quels en sont, et dans quelle mesure, les bénéficiaires. On ne peut nier qu’en certaines régions l’extension d’une petite propriété paysanne en fut facilitée. Mais il semble que souvent ce furent seulement les catégories aisées de la paysannerie ou même de la bourgeoisie des villes qui en profitèrent.

1812

Une proposition de décret du Ministère de la Guerre concerne la maquette du drapeau français.

Le nombre des couleurs franches et héraldiques est fort limité d’où la combinaison du bleu, du blanc et du rouge fut assez fréquente en France à travers les siècles. Le dauphin futur Charles VII (1419), Charles IX (1566-1570), Henri IV (1591) et Louis XIII ont eu la livrée aux couleurs vermeil (ou rouge, ou incarnat), blanc et bleu, tout comme les autres rois Bourbons.

Le bleu dérive du champ d’azur des armes de France, provenant du manteau cosmique du sacre. Le rouge était en réalité la couleur de l’oriflamme, du drapeau rouge à croix blanche servant depuis le XVe siècle, du pavillon des galères, des "brisures" des princes cadets sur l’écu royal. Henri IV, déjà roi de Navarre (ayant ainsi des chaînes d’argent sur champ de gueules), unit tout cela sur sa "cornette des couleurs et livrées", deux fois rayée horizontalement de tricolore, sa "devise" brochant. Le blanc était le champ de l’écu à croix rouge des Français sous les croisades, symbole pris par la suite en Angleterre ; on sait que les bandes de Du Guesclin allant en Castille venger la mort de la reine Blanche de Bourbon s’ornaient de croix blanches, d’où le surnom de "compagnie blanche" (1366).

Vers la fin de la guerre de Cent Ans, le blanc devint officiellement la couleur de la croix des Français, de l’étendard fleurdelisé d’or du Roi du Ciel porté par sainte Jeanne d’Arc. La France est représentée comme une femme en robe blanche fleurdelisée d’or dans Les Vigilles de Charles Septiesme  de Martial de Paris (1484). Au XVIe siècle, le blanc devint couleur de commandement pour celui qui agissait au nom du roi.

Le pouvoir municipal révolutionnaire de Paris créa, le 13 juillet 1789, une nouvelle milice parisienne à cocarde bleu et rouge, antiques couleurs de Paris (dès 1358, l’écu de la ville montrait un bateau d’argent sur champ de gueules sous un chef d’azur fleurdelisé d’or).

La présence de nombreux gardes-françaises (dont l’uniforme était tricolore) dans la milice qui deviendra garde nationale et le souvenir des couleurs américaines durent jouer un rôle car Louis XVI, balayant les cocardes blanc et noir de l’armée, imposera la cocarde tricolore surnommée "nationale" ou "de la liberté" : on ne sait pourquoi les Mémoires  de Louis-Philippe Ier et L’Appel de Louis XVI à la nation  (1793) la présentent uniquement comme la livrée des Orléans. Le 27 pluviôse an II (15 févr. 1794), la Convention nationale décida que la marine aurait le pavillon entièrement tricolore, bleu (à la hampe), blanc et rouge, à partir du 1er prairial (20 mai), date de naissance de l’actuel drapeau français.

Les armées de la Révolution, du Consulat puis de l’Empire accommodèrent de diverses manières les trois couleurs, et il fallut attendre le 8 février 1812 pour que les drapeaux, étendards et guidons aient les trois bandes verticales, à l’image du drapeau qui flottait au-dessus du pavillon central des Tuileries quand Napoléon Ier y résidait (c’est vers 1793 que l’on mit un drapeau tricolore en cet endroit, car la Convention siégeait à côté).

Cam.

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