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Chronique du 23 Mai.

1948.

Parution, le 23 Mai 1948, de " Vipère au poing ", le premier chef d’œuvre d’une longue série. Son auteur ?

Hervé Bazin (Jean-Pierre, de son vrai prénom).

Né à Angers, dans une famille bourgeoise solidement établie, petit-neveu de l’académicien René Bazin, l’auteur des Oberlé , Hervé Bazin, a refusé la place toute prête qui l’attendait.

Il se forme seul en exerçant divers métiers : journaliste, représentant de commerce, employé des postes, valet de chambre... Il écrit aussi des poèmes.

En 1946, il fonde une petite revue, La Coquille . Elle n’aura que huit numéros mais un futur académicien Goncourt y sera publié : Robert Sabatier. Son premier recueil de poèmes, Jour , reçoit le prix Apollinaire en 1947.

Un an plus tard, il publie un second recueil, À la poursuite d’Iris . Tous deux seront repris dans une édition commune en 1971. Cependant, Paul Valéry encourage le poète à se tourner vers le roman.

Et c’est ainsi qu’écrit d’une traite dans le dernier trimestre de 1947, paraît le 23 mai 1948 Vipère au poing .

Le succès est immédiat et ne se démentira plus. Aujourd’hui président de l’Académie des Goncourt et chargé d’honneurs, Bazin reste l’un des romanciers français les plus lus.

Bazin est essentiellement le romancier de la famille.

Sa première œuvre pose crûment les relations d’une mère et de son fils. Jean Rezeau, surnommé Brasse-Bouillon, a une mère qui ne l’aime pas. Lui et son frère l’ont surnommée Folcoche, contraction de " folle " et " cochonne ". La haine monte entre Folcoche et Brasse-Bouillon jusqu’à la tentative d’assassinat. Le roman s’achève sur une proclamation de Jean qui déclare que, vipère au poing, il chassera tous ceux qui tenteront de violer son indépendance. Dans le climat pudibond de l’après-guerre, ce roman fait scandale. Le public se passionne pour ces " Atrides en gilet de flanelle " (M. Nadeau).

Bazin retrouve Folcoche dans deux autres romans : La Mort du petit cheval  (1950) et Le Cri de la chouette  (1972). Dans ce dernier roman, Brasse-Bouillon a quarante-huit ans. Il est père de famille. Surgit Folcoche qui tente de semer la zizanie et se prend de passion pour Salomé, fille d’un premier mariage de l’actuelle femme de Jean. Mais Folcoche n’est pas faite pour l’amour : elle en meurt sous le regard de son fils, d’où toute haine a désormais disparu.

Entre-temps, Bazin a publié La Tête contre les murs  (1949), qui met en scène l’univers des hôpitaux psychiatriques, Lève-toi et marche  (1952), l’histoire d’une paralytique, et L’Huile sur le feu  (1954) qui conte les relations dramatiques d’une adolescente et de son père incendiaire

Avec Qui j’ose aimer  (1956), Hervé Bazin retrouve le climat familial qui lui est propre : il s’agit cette fois d’inceste entre une fille et son beau-père.

Au nom du fils  (1960), en revanche, chante les joies de la paternité même si le père mis en scène n’est, dans la réalité, que le beau-père de ses enfants. On pourrait estimer que ce dernier roman marque la fin du trajet d’Hervé Bazin : il est parti de la haine filiale pour aboutir à l’amour paternel. Il continue cependant son exploration de l’univers de la famille avec Le Matrimoine  (1967) ou Madame Ex  (1975) ; il fait une incursion du côté du roman d’idées avec Les Bienheureux de la désolation  (1970) et de l’essai avec Ce que je crois  (1977). Il publie également des nouvelles (Le Grand Méchant Doux , 1992) et rassemble les nostalgies poétiques de sa jeunesse  dans son "Œuvre poétique"  (1992).

 

1882.

Géographiquement, ce n’était pas encore le Tunnel sous la Manche, mais techniquement parlant, cette réalisation inaugurée le 23 Mai 1882, le valait bien !

" Portier des Alpes ", le col du Saint-Gothard surclasse tous les autres passages par le volume de son trafic ferroviaire et routier et par la liaison directe qu’il établit entre la plaine centrale du Pô et l’Europe du Nord.

Deux éléments géopolitiques ont fait sa fortune : d’abord la naissance de la Confédération helvétique autour du lac des Quatre-Cantons et son extension vers le Tessin ; en second lieu, la croissance de Milan et de Zurich.

Il a fallu surmonter des obstacles naturels considérables, ce qui explique l’ouverture relativement tardive du passage aux grands courants des échanges continentaux.

Château d’eau de l’Europe, le massif cristallin du Gothard est un centre de dispersion fluviale vers l’Adriatique, la Méditerranée et la mer du Nord.

Au nord descend, vers l’Aar et le Rhin, la Furka-Reuss qui parcourt le val d’Urseren sur lequel se branche le torrent affluent de la Gothard-Reuss, menant au col.

Au sud, par les pentes très escarpées du val Tremola (le val du Tremblement), on débouche sur le val Bredretto et la Léventine, section supérieure du Tessin.

Les deux versants sont unis par l’échancrure du Gothard, culminant à 2 018 mètres. Au handicap climatique, qui interdit le passage de novembre à mai, s’ajoute, entre Andermatt et Göschenen, l’étroite gorge, creusée par la Reuss dans les Schöllenen, très longtemps impraticable.

On s’accorde à situer la date de l’ouverture du col autour de 1230. Le trafic se développe rapidement et, vers 1300, le col est déjà une artère internationale, supplantant les passages valaisans. Cette fonction est renforcée, après la conquête de la Léventine par les gens d’Uri (1403-1416), puis l’acquisition des baillages du Tessin par les cantons, au lendemain des guerres d’Italie (1516).

Un chemin muletier, attesté dès le XIVe siècle, franchissait les Schöllenen par le pont du Diable et le Stiebende Brücke, construits à une date inconnue.

Les anciens noms du massif montagneux (Evelinus, Elve) et du passage (Tremola) font place, après 1250, à celui du patron de l’hospice du col, le bénédictin saint Gothard, évêque d’Hildesheim.

Le refuge, élevé sans doute vers 1374, plusieurs fois ruiné et rebâti, remonte dans son état actuel à 1777. Entre 1798 et 1803, le col fut le théâtre de violents combats et, le 24 septembre 1799, Souvarov le traversa avec 22 000 hommes.

Par le Gothard transitaient, vers l’Allemagne, la vallée du Rhin, les Flandres et l’Angleterre, les épices, la soie, les vins, tandis que descendaient, vers le sud, le bétail, le cuir, l’avoine, le sel, les céréales et les métaux des pays au nord des Alpes.

Entre 1820 et 1830, on construisit la nouvelle route carrossable, toujours en service. Dès 1845, pour remédier à l’isolement hivernal du Tessin et pour relier le réseau ferré lombard à celui de l’Allemagne du Sud, on songe au percement d’une galerie ferroviaire. L’Union du Gothard se constitue en 1863, consortium groupant les compagnies privées et les cantons intéressés et auquel adhèrent l’Italie et la Confédération de l’Allemagne du Nord (1869), puis l’Empire allemand (1871).

La Compagnie du chemin de fer du Gothard confia la réalisation de l’ouvrage à l’ingénieur genevois Louis Favre (1826-1879), qui mourut à la tâche. Le tunnel fut foré, au milieu d’énormes difficultés, de septembre 1872 à février 1880.

Mis en service le 23 mai 1882, c’est un des ouvrages techniques les plus colossaux du XIXe siècle. Entre Arth-Goldau et Biasca, la voie, longue de 120 kilomètres, comporte cinquante-cinq galeries d’accès et quatre-vingt-six ponts et viaducs. Le tunnel de 15 002 mètres est à double voie. Entre Göschenen et Airolo, il culmine à 1 151 mètres. La ligne a été électrifiée en 1920-1921.

Le Gothard est l’artère du trafic lourd entre l’Italie et les zones nord-alpines, surtout la Suisse et l’Allemagne. La route du Gothard, tuée par le chemin de fer, a pris une brillante revanche, à l’ère de l’automobile, pour la desserte du Tessin, le tourisme et le trafic international. La circulation routière à travers les Alpes s’est développée à un rythme plus rapide que celui du rail.

La nécessité d’un franchissement permanent ainsi que l’amélioration de l’écoulement du trafic sont de plus en plus urgentes. C’est pourquoi un tunnel routier a été ouvert en 1980 qui peut être utilisé toute l’année par les véhicules.

325.

Ouverture du Concile de Nicée.

Hier, 21 Mai, je parlais de Saint Constantin, l’Empereur qui a officialisé la religion Chrétienne.

Après sa victoire sur son collègue, le consul Licinius (sept. 324), Constantin, premier consul, achève d’étendre sa domination à tout l’Empire romain en annexant les provinces orientales ; il y trouve les Églises chrétiennes profondément divisées sur des questions de discipline ecclésiastique, comme la fixation de la date de Pâques, par l’existence en Égypte du schisme mélétien, séquelle de la grande persécution de Dioclétien, et surtout par les contestations entre partisans et adversaires d’Arius ; ce prêtre d’Alexandrie avait été condamné quelques mois plus tôt par son évêque Alexandre pour sa doctrine subordinatianiste, mais était soutenu par bon nombre de théologiens faisant autorité, évêques en Palestine ou en Asie Mineure.

Déjà sans doute sinon converti, du moins favorable au christianisme, Constantin se préoccupa de rétablir la paix et l’unité de l’Église ; il envoya son conseiller ecclésiastique, l’évêque espagnol Ossius de Cordoue, enquêter sur la situation à Alexandrie.

Vu l’intensité de la querelle, il lui parut nécessaire de convoquer un concile œcuménique, rassemblant non plus seulement comme les conciles précédents les évêques d’une province ou d’une région, mais ceux de l’ensemble de la chrétienté.

Que l’idée vînt de Constantin lui-même ou qu’elle lui ait été suggérée par tel ou tel évêque, c’est l’empereur qui mit en œuvre sa réalisation : c’est lui qui convoqua les évêques, mettant à leur disposition, privilège exceptionnel, les services de la poste impériale.

Le 23 Mai 325, c’est lui qui ouvrit et présida le concile réuni à Nicée, près de Nicomédie, la résidence impériale car la nouvelle capitale de Constantinople n’était pas encore inaugurée.

On discute encore pour savoir quel a été le rôle effectif de Constantin au cours des débats, soit qu’il y ait pris une part personnelle et active, soit qu’il ait attendu que les évêques aient tranché des questions dépassant sa compétence.

Ce concile réunit plus de deux cents évêques : le nombre exact n’en est pas connu ; le chiffre de 318, qui deviendra traditionnel, fut choisi plus tard pour sa valeur symbolique en référence au chiffre de la maison d’Abraham.

Les listes des participants qui nous ont été transmises semblent avoir été reconstituées après coup.

La très grande majorité venait d’Orient (Égypte, Palestine, Syrie, Asie Mineure) ; les Occidentaux étaient très peu nombreux : la Gaule, par exemple, qui comptait pourtant déjà entre quarante et cinquante Églises n’était représentée que par l’obscur Nicasius de Die, dont la présence en Orient était peut-être accidentelle.

L’éventail des tendances théologiques présentes au concile était très ouvert : partisans ou amis d’Arius comme Eusèbe de Nicomédie ; subordinatianistes modérés comme Eusèbe de Césarée ; conservateurs timides, plus soucieux d’unité que de précision et par là hostiles à toute définition nouvelle ; adversaires résolus de l’arianisme – l’évêque d’Alexandrie était accompagné de son diacre et futur successeur, Athanase –, soutenus par des extrémistes, tel Marcel d’Ancyre, qui tombaient, consciemment ou non, dans l’erreur opposée à celle d’Arius, le sabellianisme.

Cependant une quasi-unanimité s’établit pour anathématiser Arius et adopter une formule de foi, le fameux Credo de Nicée, où l’égalité absolue du Père et du Fils était exprimée par le terme grec homoousios , " consubstantiel ".

 

Bien à vous,

Cam.

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Dernière modification le 25/09/98, ©camilist 1998 --- une remarque ?
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