Mois de Juillet / sommaire des chroniques / sommaire de Camilist

Chroniques du 19 Juillet.

1834.

Naissance à Paris du peintre Edgar Degas.

Fils d’un banquier, Edgar Degas grandit dans un milieu bourgeois cultivé : son père, amateur de peinture, est aussi mélomane ; grâce à lui, le futur peintre découvre les grands auteurs dont  " Ingres ".

Il fréquente le cabinet des Estampes, copiant Dürer, Mantegna, Véronèse, Rembrandt.

Ses voyages en Italie, où il a de la famille, sont nombreux et prolongés et l’artiste envoie, de l’étranger, des œuvres aux expositions impressionnistes.

Mais malgré ses voyages, ce qui compte essentiellement pour Degas, c’est Paris, et Montmartre.

Il fréquente certains cénacles, ateliers, cafés littéraires et mène avec quelques bourgeois, ses intimes, une vie conformiste de célibataire hautain.

De son milieu familial, il conserve la réserve et le respect des principes.

Sa délicatesse de cœur, son intransigeance morale lui valent l’estime de tous, même de Gauguin.

À partir de 1905, le peintre se retranche de plus en plus dans son atelier, luttant contre la cécité qui le gagne.

Il meurt à Paris le 27 septembre 1917.

Il est délicat de cerner la personnalité artistique de ce peintre.

S’il prolonge le respect ingresque de la ligne, il refuse la vénération plastique de la forme : ses exigences de véracité l’éloignent des canons de l’école.

Ce n’est pas non plus au mouvement impressionniste que l’historien peut le rattacher : le refus systématique du plein air, un crayon preste et cruel établissent entre l’impressionnisme et lui un clivage certain.

Par rapport à la spontanéité, au chant féerique d’une lumière joyeuse, la peinture de Degas – art médité s’il en fut – jette une note âcre et sourde.

Le registre et la valeur expressionniste de son coloris, l’évolution constante de ses recherches techniques dépassent infiniment le champ d’exploration des impressionnistes, ses contemporains.

Or, devant la défection de Manet, il s’affiche leur défenseur, organise leurs expositions, découvre les nouveaux talents.

Sa situation d’exception n’échappe pas aux critiques d’alors : bien qu’on dénonce son modernisme gênant, il est le moins discuté des artistes français de cette époque.

Plus tard, en 1894, au moment du legs Caillebotte à l’État français, il sera le seul dont on acceptera intégralement les œuvres.

Entre Ingres et Delacroix, et par-delà Cézanne, comment situer l’énigmatique Degas ?

Défenseur du réalisme, tenté cependant par les paradoxes visuels et tous les pièges de l’illusion, il exploite les ressources de la modernité acheminant la peinture vers un monde déformé, élargi aux dimensions du rêve et de l’imaginaire.

1969

19 Juillet. L’une des secrétaires d’Edward Kennedy, le plus jeune frère du Président assassiné, se noie, après une soirée passée en compagnie d’Edward et d’amis communs, sur la petite île de Chappaquiddick (Massachussetts).

Le sénateur, qui était aux commandes de la voiture ne semble avoir rien fait (ou tout au moins pas grand chose) pour tenter de l’aider et de la repêcher.

Edward Moore Kennedy, né le 22 février 1932 à Brookline dans le Massachusetts, est le plus jeune des garçons de la famille Kennedy.

C’est aussi celui sur lequel les jugements les plus contradictoires ont été prononcés.

Sa carrière politique est facilitée par ses relations familiales, mais également par ses talents ; Joseph Kennedy, son père, disait de lui qu’il était " le meilleur politicien " du clan.

Diplômé de Harvard, il mène des études de droit à La Haye et à l’université de Virginie.

En 1962, il conquiert le siège de sénateur du Massachusetts que son frère, John, avait occupé avant son élection à la présidence.

Son activité sénatoriale reste discrète, d’autant plus qu’en 1964 il est victime d’un accident d’avion qui le confine sur un lit d’hôpital pendant plusieurs mois.

On parle de plus en plus de lui après l’assassinat de Robert Kennedy.

John n’avait-il pas déclaré un jour : " Je suis entré dans la politique parce que Joe est mort. S’il m’arrive quelque chose, Bob prendra la place. S’il arrive quelque chose à Bob, Ted prendra le flambeau " !

De fait, celui-ci joue les premiers rôles au Sénat et se pose en sérieux prétendant à l’investiture démocrate pour l’élection présidentielle.

Mais une tragédie vient assombrir l’avenir du dernier Kennedy : le 19 juillet 1969, l’une de ses secrétaires, Mary Jo Kopechne, se noie.

Sa carrière politique est sur le point de tourner à la catastrophe : il fait, grâce à une allocution télévisée dans laquelle il admet ses torts, un étonnant rétablissement.

Réélu au Sénat en 1970, il ne sera pas candidat à la présidence de 1972.

Pourtant, Edward Kennedy n’en demeure pas moins un sénateur sérieux, dont les votes et les initiatives le classent parmi les libéraux.

Il appuie les projets de loi qui visent à assurer les droits civiques aux Noirs, à combattre la pauvreté, à contrôler la vente des armes, à étendre le bénéfice de la sécurité sociale.

Peu à peu, la personnalité se dessine, et Edward Kennedy, candidat à l’investiture démocrate pour l’élection présidentielle de 1980, recueille assez de voix aux primaires pour inquiéter Jimmy Carter, qui se représente.

Il demeure, au Sénat, une figure importante du Parti démocrate.

1992

Assassinat en Sicile de Paolo Borsellino, un des 2 juges les plus impliqués dans la lutte contre la Maffia.

Déjà le 23 Mai de la même année, la Pieuvre avait-elle réussi à éliminer le juge Giovanni Falcone, dans un attentat qui par l’ampleur des moyens prouvait clairement l’énorme influence de la Maffia sur toute la vie politique, financière et même populaire.

Ces deux assassinats d’Hommes de la Justice, avaient été précédés par celui du maire de Palerme, Salvo Lima, député Européen et bras droit d ‘Andréotti, suspect depuis longtemps de connivence formelle avec la Maffia ; ce qui souligne évidemment les rapports entre l’organisation criminelle et le pouvoir politique.

Au milieu des années quatre-vingt, le pool de jeunes magistrats palermitains, autour de Giovanni Falcone, avait obtenu d’importants succès, grâce en particulier aux " repentis ".

Le plus important d’entre eux, Tommaso Buscetta, avait ainsi permis non seulement l’arrestation de nombreux mafiosi et la tenue du maxi-procès de Palerme en 1986, mais une connaissance beaucoup plus précise des mécanismes internes de l’organisation criminelle.

Mais, les années suivantes, la situation n’avait cessé de se dégrader. Des querelles de délimitation de compétence avaient opposé le Haut Commissariat et les juges spécialement chargés de la lutte antimafia à la magistrature ordinaire, les carabiniers aux policiers.

L’observation rigoureuse par le Conseil supérieur de la magistrature des usages administratifs dans la gestion des carrières – le privilège de l’ancienneté en particulier – avait eu pour conséquence de démanteler l’équipe efficace de Giovanni Falcone.

En même temps, le respect scrupuleux des garanties largement accordées aux inculpés par le nouveau Code pénal en vigueur depuis le 1er janvier 1989 avait amené la libération de nombreux mafieux.

Sous la dictature de Toto Riina et de son clan des Corleondesi, la mafia avait de son côté trouvé des parades efficaces : un cloisonnement plus rigoureux, une intimidation impitoyable des repentis et, surtout, l’élimination des policiers et des magistrats les plus dangereux pour elle.

Au début des années quatre-vingt-dix, la mafia semble ainsi à l’apogée de son pouvoir, contrôlant, de l’aveu même du président de la République Francesco Cossiga, des régions entières et étendant ses tentacules sur une grande partie du territoire et du secteur financier.

C’est pourtant le moment où l’environnement socio-culturel et politique qui lui a permis de prospérer est en train de s’écrouler. Les assassinats de Giovanni Falcone et de Paolo Borsellino ont été les révélateurs des changements dans la société méridionale par la forte mobilisation qu’ils ont suscitée et par les condamnations de plus en plus véhémentes de l’Église.

La transformation culturelle concerne également l’organisation elle-même. La loi de l’omertà  et les rites d’initiation qui en faisaient une contre-société tendent à disparaître, comme le montre la multiplication du nombre des repentis.

Exceptionnels dans les années soixante-dix, ils sont en 1993 plus de quatre cents.

Leur nombre et leurs révélations sont par ailleurs étroitement liés à la modification des rapports entre la mafia et les institutions.

La liaison entre ces deux ordres est une constante de l’histoire italienne depuis l’Unité.

Garante d’un certain ordre social et politique au XIXe siècle, la mafia a vu ce rôle réaffirmé à partir des années quarante.

Utilisée par des Américains pour faciliter le débarquement en Sicile, elle l’a ensuite été par les partis modérés pour faire obstacle au communisme en canalisant sur eux les votes qu’elle contrôlait.

Excellent agent électoral pour une Démocratie chrétienne sans racines dans le Midi au lendemain de la guerre, elle agit donc comme un acteur important de la stabilisation sociale et politique.

Ces raisons idéologico-politiques expliquent largement les compromissions du parti dominant, le long silence de la hiérarchie religieuse, sans doute aussi l’implication des services secrets italiens et américains, et celle des loges maçonniques occultes, dont la P2 n’est pas le seul exemple.

Ces raisons tombent en grande partie avec la disparition du communisme interne et international à la fin des années quatre-vingt.

On observe alors une détermination plus affirmée de l’État pour mettre fin à ces liaisons dangereuses, tandis que les repentis commencent à révéler les connivences passées.

En 1991, plusieurs conseils municipaux suspects de complicité avec la mafia sont dissous par le ministre de l’Intérieur Vincenzo Scotti, tandis que les décrets émis en juin de la même année par le gouvernement Andreotti renvoient en prison quarante mafiosi importants remis en liberté pour échéance des termes légaux de la détention préventive.

Le président de la première section de la Cour de cassation, Corrado Carnevale, responsable de l’annulation de nombreuses sentences contre des mafiosi, est transféré du secteur pénal au secteur civil avant de faire l’objet, en 1993, d’une ouverture d’enquête pour complicité avec l’organisation criminelle.

En son absence, la Cour de cassation confirme, en janvier 1992, les sentences prononcées par les juges du maxi-procès de Palerme, dont plusieurs condamnations à la prison à vie.

Les conséquences de ce durcissement sont rapides. La mafia réagit par le meurtre de Salvo Lima coupable de n’avoir pas pu ou plus voulu intervenir en faveur des prisonniers, et son assassinat prend le sens d’un avertissement lancé aux autres garants politiques de l’immunité mafieuse.

Inversement, les repentis voient dans l’action plus rigoureuse de l’État, et aussi dans le séisme qui secoue la vieille classe politique à la suite des élections et des enquêtes judiciaires, le signal attendu pour élargir le champ de leurs révélations.

Concernant l’organisation elle-même, ces révélations permettent à la police de remporter des succès éclatants, comme l’arrestation, le 15 janvier 1993, de Toto Riina, précédée et suivie de celles de ses principaux lieutenants.

S’agissant des liens entre la mafia et les institutions, elles provoquent un choc encore plus grand en mettant directement en cause l’homme politique le plus puissant d’Italie jusqu’à ces derniers mois, Giulio Andreotti.

Député de 1946 à 1992, sénateur à vie en 1992, membre de presque tous les gouvernements depuis 1947, sept fois président du Conseil, candidat tacite en mai 1992 à la présidence de la République, Giulio Andreotti est dénoncé par plusieurs mafiosi comme la " référence romaine " de l’organisation criminelle.

Il est aussi accusé d’être au cœur de tous les grands drames ou scandales nationaux non encore entièrement éclaircis, comme la faillite et l’assassinat des banquiers Michele Sindona et Roberto Calvi, les meurtres du général Dalla Chiesa, du journaliste Mino Pecorelli et d’Aldo Moro lui-même.

Atteint le 27 mars par une demande d’ouverture d’enquête des magistrats palermitains, Andreotti appuie sa défense à la fois sur l’invraisemblance de certaines révélations et le peu de crédibilité de ses accusateurs, et sur l’arsenal de mesures antimafia prises par son gouvernement en 1991.

Il peut plus difficilement justifier ses rapports très étroits avec Lima.

Pour le moment, cet