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Chroniques du 22 Juillet.

1246

Au terme d’un périple extraordinaire qui laisse loin derrière les voyages " non prouvés " de Marco Polo, l’explorateur Plan Carpin, aboutit à Qaraqorum.

Moine franciscain né en 1182, Jean du Plan Carpin (en italien Giovanni dal Piano dei Carpini) fut chargé par son ordre de missions en Saxe et en Rhénanie ; en tant que provincial d’Allemagne, il séjourna en Pologne et en Hongrie dans les années 1224-1230.

Originaire des environs de Pérouse, Plan Carpin a environ quarante-cinq ans lorsqu’il part pour Qaraqorum en qualité d’ambassadeur extraordinaire d’Innocent IV auprès du grand khan des Mongols.

Les Mongols, qui se sont avancés en 1241 jusqu’aux faubourgs de Vienne, semblent en reflux.

Mais l’Occident chrétien, toujours divisé par la lutte entre pouvoir spirituel et pouvoir temporel, et tout occupé de sa croisade contre l’Islam, est mal armé contre l’envahisseur.

Des récits terrifiants circulent sur le sort réservé aux peuples vaincus. Un voyageur dominicain, Julien de Hongrie, a précédé Plan Carpin, mais il n’est guère allé au-delà de la Volga, arrêté par les armées tartares dont il a décrit la force et la volonté de dominer le monde.

Plan Carpin est donc envoyé auprès des Mongols en tant que missionnaire et informateur à la fin de 1245.

Il a laissé de son voyage une relation destinée à Innocent V, Historia Mongolorum  (qui a été traduite en français sous le titre Histoire des Mongols ), œuvre d’un intellectuel doué d’un excellent esprit d’observation et qui s’efforce de se dégager des préjugés et des légendes de son temps.

C’est le 22 Juillet 1246 qu’il arrive enfin à Qaraqorum.

Il assiste à l’intronisation de Guyuk khan et prend le chemin du retour en novembre de la même année.

Il lui faudra encore un an pour regagner Lyon.

Il rapportait une lettre du grand khan qui précisait de nouveau la menace mongole sur la chrétienté.

Malgré cette menace, le récit de Plan Carpin connut un immense succès ; aux observations géographiques et climatiques s’ajoutait une moisson de renseignements sur les peuples rencontrés, sur leurs mœurs, sur leur organisation politique et militaire, sur leur religion.

Le franciscain y laissait parfois percer sa sympathie pour les Mongols, leur pauvreté, leurs mœurs patriarcales, leur morale austère, et cela malgré le froid, la faim, les fatigues et les dangers endurés pendant le voyage.

Jean du Plan Carpin a ouvert la voie des échanges entre l’Orient et l’Occident, que la " paix mongole " va favoriser durant quelques décennies.

Guillaume de Rubrouck (Ruysbroeck) fera un voyage similaire huit ans plus tard.

Bien avant le périple (non encore prouvé) de Marco Polo.

 

1808

La Grande Armée, l’armée de Napoléon, considérée comme invincible, celle qui a conféré au petit " caporal ", ses plus hauts faits d’armes, la Grande Armée est vaincue, et en rase campagne, en plus.

Elle doit capituler, à Bailen, devant Cadix, le 22 Juillet 1808. La chaleur accablante, le manque d’eau, la fatigue, une certaine usure, et le Général Dupont ne parvient pas à prendre le dessus sur une " junte " militaire relativement peu importante.

Certes, la défaite est sans importance dans l’ensemble des opérations, au point de vue militaire. Mais elle a des conséquences psychologiques inestimables.

Les Espagnols, mal organisés en juntes sans aucune liaison, ont vaincu la Grande Armée. La résistance Nationale stimulée par cet exploit n’aura de cesse de bouter les Français dehors.

Cette défaite en Espagne troublera les plans Européens de Bonaparte qui voulait lui aussi instaurer l’Europe de l’Atlantique à l’Oural. De plus le débarquement Anglais au Portugal qui oblige les Français à l’évacuer, affaiblira le prestige de l’Empereur et surtout son image de Conquérant.

 

1832

Mort de l’Aiglon.

Le fils de Napoléon et de Marie-Louise à peine âgé de 4 ans lors de la seconde abdication de son père, élevé en Autriche dans la famille de sa mère, meurt d’une maladie de poitrine après avoir pris froid lors d’une parade militaire.

La vie et la personnalité de Napoléon II, duc de Reichstadt, l’"Aiglon", fils de Napoléon, roi de Rome, prince de Parme, ont été tout à la fois obscurcies et embellies par la légende.

Barthélemy et Méry créent en effet, sous la Restauration, un mythe bonapartiste : François Joseph Napoléon est "le fils de l’Homme" (c’est aussi le titre de leur ouvrage paru en 1829), tenu volontairement par son entourage autrichien (la famille de sa mère) dans l’ignorance de la gloire passée de son père.

Pour Victor Hugo et les romantiques, il devient la victime d’un destin implacable : "Tous deux sont morts. — Seigneur, votre droite est terrible."

Après 1870 et la perte de l’Alsace-Lorraine, alors que s’impose l’idée de la revanche contre l’Allemagne, Edmond Rostand s’empare du personnage. Il en fait un captif de Metternich comme sont captives les provinces perdues.

L’Aiglon  est avant tout une exaltation des sentiments germanophobes que la tirade de Metternich devant le chapeau du vainqueur d’Iéna et de Wagram vise à exacerber.

Et Napoléon II ; Il a fallu attendre 1957 pour qu’un ensemble exceptionnel de documents concernant Marie-Louise soit retrouvé, dont 119 lettres du duc de Reichstadt à sa mère et 870 missives de son gouverneur, le comte Moritz von Dietrichstein.

Alors se précise le vrai visage du fils de Napoléon.

Né le 20 mars 1811, au moment où se dessinent les premiers craquements de l’Empire (malaise religieux, crise économique, guerre d’Espagne), le roi de Rome retient si peu l’attention qu’on l’oublie au moment de l’affaire Malet.

Napoléon a échoué dans son effort pour créer "la quatrième dynastie".

En 1814, Napoléon abdique une première fois en faveur de son fils, puis sans conditions.

Marie-Louise et le roi de Rome, retenus en Autriche depuis la chute de l’Empire, ne le rejoindront pas au retour de l’île d’Elbe.

L’abdication de l’Empereur en faveur de Napoléon II, le 22 juin 1815, est sans effet.

Dès lors commence le deuxième acte de la vie de l’Aiglon.

Éducation à l’autrichienne, mais nullement, comme le montrent les lettres retrouvées, la cage dorée imaginée par certains historiens.

À Schönbrunn, il a pour précepteur Dietrichstein. Loin de sa mère, alors à Parme avec Neipperg, il ne peut compter que sur l’affection de son grand-père, le vaincu d’Austerlitz, l’empereur François.

Il grandit, découvre l’histoire de son père, mène quelques intrigues amoureuses.

Son nom est acclamé dans plusieurs pays, dont la France, lors des révolutions de 1830, mais il ne sera pas même roi des Belges ou de Pologne : Metternich et son conseiller Gentz veillent.

Son élévation eût remis en cause les principes de la Sainte-Alliance (accords pris au Congrès de Vienne après la défaite de Waterloo entre les Alliés).

Il sera simple lieutenant-colonel d’un régiment d’infanterie à Brünn.

Ayant pris froid au cours d’une parade, il meurt quelques mois plus tard, le 22 juillet 1832. Napoléon III demanda vainement le retour de ses cendres en France.

C’est Hitler qui devait les restituer en décembre 1940 comme gage de la collaboration franco-allemande.

Jusqu’au bout, le destin se sera acharné sur l’infortuné fils de Napoléon Ier.

1860

Naissance à Londres, de Frédérick William Rolfe, homosexuel notoire, Chrétien et ancien séminariste, escroc de surcroît, peintre qui ne manque pas de talent et écrivain contesté, un personnage hors du commun.

A tel point que Corto Maltese le campe dans plusieurs de ses réalisations. Serge Bastien pourra peut-être nous aider à situer l’œuvre.

L’écrivain " fantastique " Jean Ray également dans différentes nouvelles.

Parmi les écrivains anglais victimes du puritanisme victorien, Frederick Rolfe, dit baron Corvo, a mis un singulier acharnement à se venger d’une société dont il se sentait exclu.

Catholique par haine de la "cagoterie luthérienne", homosexuel par inclination et escroc par nécessité, il n’eut de cesse de se perdre avec intelligence et ostentation, et d’entraîner dans sa débâcle ceux dont il sollicitait le crédit et l’amitié, et qui ne daignèrent pas lui offrir davantage.

Car, menant une entreprise cynique et désespérée, il gardait au cœur la nostalgie d’un absolu de l’amour et de la générosité.

Né à Londres, le 22 juillet 1860, Rolfe quitte la maison paternelle à quinze ans, étudie à Oxford, se convertit au catholicisme à vingt-cinq ans et ambitionne de devenir prêtre, cherchant dans le faste liturgique, à la manière de Julien Sorel (Le Rouge et le Noir), de quoi s’assurer d’un pouvoir inaccessible par ailleurs.

Reçu au séminaire d’Oscott, il en est chassé pour homosexualité et un certain manquement au devoir d’humilité (il avait peint une apothéose de saint Guillaume de Norwich où tous les personnages étaient des autoportraits).

Une seconde tentative, au séminaire écossais de Rome, où l’avait recommandé l’évêque d’Édimbourg, ne produira guère de meilleurs résultats.

De retour en Angleterre, il peint des fresques d’église et des bannières religieuses, écrit des nouvelles, se fait appeler baron Corvo, invente un procédé de photographie sous-marine, dénigre le catholicisme, est poursuivi pour escroquerie.

En 1898, plusieurs de ses récits, publiés auparavant dans la revue littéraire The Yellow Book , paraissent sous le titre " Stories Toto Told Me " .

Pendant les dix ans de son séjour à Londres, il publie " Chronicles of the House of Borgia "  (1901), étude historique truffée d’érudition et d’anecdotes curieuses, et " In His Own Image "  (1901).

" Hadrien VII "  (1904) est un étonnant roman utopique et autobiographique. Sous les traits d’un pape éclairé, " pauvre, solitaire, altruiste et misanthrope", prisonnier d’un Vatican en proie à l’affairisme, résolu à mettre l’Église au service des déshérités et payant de sa vie ses décrets à coloration subversive, l’auteur y présente "la vie antérieure de Frederick Rolfe telle qu’il désirait qu’on s’en souvînt, et ses années à venir comme il eût voulu qu’elles fussent".

" Don Tarquinio " , publié en 1905, retrace vingt-quatre heures de la vie d’un courtisan à la cour de Borgia.

Emmené à Venise par le professeur Dawkins, Rolfe se prend de passion pour la ville, se jette dans une folle prodigalité et se brouille avec ses derniers amis.

Un moment hébergé dans un palais, il en est expulsé lorsque ses hôtes découvrent le manuscrit de " The Desire and Pursuit of the Whole " , où tous les membres de la colonie britannique de Venise sont traînés dans le ridicule.

Réduit à la misère, il doit vivre d’expédients. Admis une première fois à l’infirmerie britannique en 1910, il y retourne pour y mourir le 26 octobre 1913.

Le récit de ses années de détresse forme la matière du roman Le Désir et la Poursuite du Tout , qui ne paraîtra qu’en 1934. L’auteur, sous le nom de Nicholas Crabbe, sauve du tremblement de terre de Messine une jeune fille qu’il habille en garçon et dont il fait son serviteur dévoué et affectueux. Zeldo veille sur lui tandis que tous l’abandonnent. Alors qu’il cherche un endroit où mourir discrètement, l’androgyne le sauve non par devoir mais par amour.

En dépit "des dieux qui raillent son désir", la volonté de Crabbe de ne jamais renoncer découvre son meilleur allié dans la misère et la splendeur de Venise.

"C’est ainsi que le Désir et la Poursuite du Tout furent couronnés et récompensés par l’Amour."

La vie et l’œuvre de Rolfe sont liés à la passionnante biographie de A. J. A. Symons, " À la recherche du baron Corvo "  (1934).

1967

Mort à Flat Rock, aux E.U., de l’écrivain américain Carl Sandburg (1878 – 1967).

D’origine suédois, le plus grand des bardes américains publie les " Chicago Poems " en 1916, ce qui asseoit sa célébrité naissante.

Il ne cessera de poursuivre toutes les œuvres populaires " orales " et " chantées " de l’Histoire des E.U..

Poète du peuple dont il partage les colères et les enthousiasmes, il entre en politique, comme dans un combat pour le peuple, au sein du Parti Social Démocrate.

Malgré les succès (Prix Pullitzer en 1951), prix du Wisconsin etc. il reste simple et accessible à quiconque désire lui parler de la tradition, du floklore et de l’Histoire de son pays.

Il écrit également, de nombreux livres pour enfants, caractérisés par une grande générosité, beaucoup de poésie et un esprit inventif étonnant (" Rootabaga stories ", " Rootabaga Pigeons ", " Potato Face " et " le très joli " Wind Songs ").

Cam.

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Toutes ces chroniques ont été écrites par Cam (cleclercq@cybernet.be)
Dernière modification le 26/10/98, ©camilist 1998 --- une remarque ?
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