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Chroniques du 30 Juillet.

1968

Révolution en Irak, apparition de Sadam Husseim.

Depuis le 16 avril 1968, date à laquelle quelques officiers baassistes font circuler une pétition réclamant l’élection d’une Assemblée nationale, la conjuration s’étend.

Cette fois, elle est d’inspiration uniquement baassiste, les alliés du Baas ayant fait défaut au dernier moment.

Le 17 juillet, au petit matin, les troupes des commandants Abdel Razzak Nayef et Ibrahim Abdel Rahman Daoud se joignent à celles du brigadier Bakr pour encercler le palais présidentiel.

Le général Aref se rend presque aussitôt : le sang n’a pas coulé.

Un Conseil de commandement de la révolution (C.C.R.) est formé, qui élit Hassan al-Bakr à la présidence de la République et donne le gouvernement au commandant Nayef, le commandant Daoud se voyant réserver le portefeuille de la Défense.

Cependant, au bout de quelques jours un conflit oppose ces deux officiers à leurs compagnons.

Le 30 juillet, pour prévenir toute tentative de leur part, la division du général Hamadi al-Takriti prend le contrôle de Bagdad, le gouvernement est dissous, Nayef et Daoud sont mis d’office à la retraite.

Le 31, le général Bakr préside le nouveau cabinet, Hardan al-Takriti devenant vice-Premier ministre et ministre de la Défense, poste qu’il gardera jusqu’en avril 1970, avant d’être, à son tour, définitivement écarté (15 oct. 1970).

Cette seconde révolution du 30 juillet 1968 consacre le succès du mouvement révolutionnaire engagé le 17 juillet et la prééminence du parti Baas : Saddam Hussein al-Takriti, qui s’est consacré dans le secret à la réussite du coup d’État, rejoint le président Bakr.

1830

Le " Coq " gaulois est adopté.

Utilisé dès l’Antiquité, on ne peut assurer que le coq servit d’enseigne aux Gaulois, encore qu’il apparaisse sur certaines monnaies.

Il deviendra cependant symbole de la Gaule et des Gaulois à la suite d’un jeu de mots facile ; le terme latin gallus  signifiant à la fois coq et Gaulois.

La Renaissance devait mettre en rapport le coq et la France.

Les rois Valois et Bourbons furent parfois accompagnés de cet oiseau symbolisant la France sur des gravures, monnaies, en-têtes de papier timbré, peintures, etc.

Versailles et le Louvre connaissent le coq, qui reste cependant un emblème mineur.

La Révolution en fait beaucoup plus large usage : c’est le symbole de la France ou plus précisément celui de la Vigilance, rejoignant ainsi en quelque sorte le coq des églises qui attend le lever du jour, image du Soleil de justice, c’est-à-dire du Christ.

Le Directoire le conserve, au milieu d’autres objets, sur son sceau ; il somme le casque de la France assise, sur le papier à lettres du Premier consul, et se trouve aussi sur un écu, orné du bonnet phrygien et des lettres R.F., sur une médaille de 1801.

Pourtant, si la commission des conseillers d’État proposa, en 1804, le coq à Napoléon Ier, celui-ci déclara n’en pas vouloir : "Le coq n’a point de force, il ne peut être l’image d’un empire tel que la France."

Il se fit donc rare par la suite.

En 1817, on déclarait encore à la Société royale des antiquaires de France : "Le coq, gallus , animal consacré au dieu Mars, le symbole de la vigilance, du courage et de la valeur, fut l’emblème des Gaulois ; il est encore celui des Français."

L’imagerie s’empara du coq lors de la révolution de 1830.

Le lieutenant général, duc d’Orléans, signa le 30 juillet une ordonnance mettant le coq gaulois sur les drapeaux et boutons d’habit de la garde nationale, et les drapeaux tricolores de l’armée en furent sommés : le coq remplaçait ainsi en quelque sorte l’aigle impériale : la patte dextre du volatile s’appuyait sur une boule marquée du mot France.

Le sceau de l’État montre l’écu royal (armes d’Orléans puis tables de la loi représentant la Charte) posé sur six drapeaux dont la hampe est surmontée du coq.

La IIe République fit graver le sceau de l’État qui sert encore, à peine rectifié, pour sceller les constitutions : la Liberté assise y tient un gouvernail marqué d’un coq à la patte posée sur une boule.

On retrouvera encore le coq sur la hampe des drapeaux de l’armée, mais le prince-président y mettra l’aigle de son oncle.

Sous la IIIe République le coq fut parfois utilisé sur un écu pour faire pendant aux armes d’un souverain venant en France.

La grille du palais présidentiel de l’Élysée s’orna d’un coq du côté des Champs-Élysées (c’est la "grille du coq") et la pièce d’or de 20 francs émise en 1899 porta aussi cet animal.

Lors de la Première Guerre mondiale, on opposa souvent graphiquement coq gaulois et aigle allemande.

Cependant, le volatile national, n’en déplaise à certains, ne fait plus partie de la symbolique actuelle, la France étant souvent représentée par une femme coiffée d’un bonnet phrygien, c’est la Marianne dont on retrouve le buste ou la statue dans toutes les mairies.

La Belgique d’expression française ou Wallonie emploie le coq sur son drapeau et elle l’oppose au lion des Flamands et des flamingants.

1791

Suppression des discriminations de naissance. Nous devenons tous " ci-devant " !

L’expression de ci-devant se dit fréquemment au XVIIe et au XVIIIe siècle des personnes et des choses dépossédées de leur état ou de leur qualité. Le terme en vint à désigner pendant la Révolution les anciens nobles.

Si Chateaubriand a pu dire que "les plus grands coups portés à l’antique constitution de l’État le furent par des gentilshommes ; les patriciens commencèrent la Révolution", la noblesse devait en réalité beaucoup souffrir de cette révolution.

Dans la nuit du 4 août 1789, elle a renoncé à ses privilèges, mais non à ses titres.

Le décret du 19-23 juin 1790 déclare : "La noblesse héréditaire est pour toujours abolie."

Les qualifications nobiliaires (Monseigneur, Éminence, Grandeur, Excellence) sont supprimées. Armoiries et livrées subissent le même sort. Les ordres de chevalerie disparaissent à leur tour.

Commencés le 30 juillet 1791, les débats de l’Assemblée aboutissent en effet à la suppression de "tout ordre de chevalerie ou autre, toute corporation, toute décoration, tout signe extérieur qui suppose des distinctions de naissance".

Cette suppression de la noblesse est réclamée depuis longtemps. Les attaques dans les libelles de 1788 à avril 1789 n’ont pas manqué : les exemptions fiscales sont dénoncées comme "un délit national" et les privilèges qualifiés d’anarchistes. Est-il nécessaire de citer les tirades de Beaumarchais dans Le Mariage de Figaro ?

La réaction nobiliaire des dernières années du règne de Louis XVI a excité les passions. "Qu’est-ce qui a fait la Révolution ? disait Napoléon. La vanité. La liberté n’a été qu’un prétexte."

Privé de tous ses droits par les mesures des 6 juillet et 25 août 1792, puis par celles du 17 juillet 1793, le ci-devant est devenu un suspect pendant la Terreur. Ses biens sont confisqués lorsqu’il émigre (loi du 28 mars 1793). S’il est resté, il connaît souvent la prison (loi du 17 septembre 1793), qu’évoquent de nombreux mémoires (Beugnot, Pasquier...), et même l’échafaud.

Il convient toutefois de ne pas exagérer les pertes de l’aristocratie : 15 p. 100 de ses membres, appartenant surtout à la haute noblesse, sont victimes de la Terreur.

La fortune de l’ordre est davantage éprouvée, mais moins qu’on ne l’a écrit. Dans bien des régions, il y a peu de changements : prête-nom, divorce fictif, intendant achetant le domaine, autant de moyens qui ont permis de tourner la loi.

C’est le clergé qui fait les frais de la vente des biens nationaux.

Mais, quand les nobles retrouvent leurs domaines, c’est souvent pour en constater le délabrement.

Rémusat note dans ses Mémoires  : "Le séquestre, les mesures révolutionnaires, les mauvaises années, les difficultés de tout genre avaient dégradé les propriétés, supprimé les revenus, aggravé les dettes."

Ainsi s’explique avec de notables exceptions l’entrée des ci-devant dans la noblesse d’Empire après 1808.

1784

Mort à Paris du philosophe encyclopédiste, Diderot.

Né à Langres en 1713, il sera considéré comme le philosophe p "par excellence ". Son génie multiple lui fera créer la critiques d’art (" Salons "), une nouvelle forme romanesque (" Jacques le Fataliste "), l’éclaircissement des rapports entre science et métaphysique (" Lettres sur les Aveugles "), de nouvelles formes esthétiques et dramatiques (" Le fils Naturel ").

Mais c’est surtout l’Encyclopédie à laquelle il consacrera plus de 20 ans de sa vie qui lui garde cette gloir qui aujourd’hui encore l’auréole comem le plus grand des " philosophes encyclopédistes " !

1771

Mort dans sa 55° année de Thomas Gray, l’un des plus grands poètes britanniques du XVIII° siècle.

Solitaire et mélancolique, grand admirateur de la nature "sauvage", Thomas Gray, l’un des grands noms de la poésie anglaise du XVIIIe siècle, manifesta aussi un intérêt profond pour les littératures celtique et nordique, se faisant ainsi le héraut de ce qui allait être la sensibilité romantique.

Né le 26 décembre 1716 à Londres, Gray fut le seul enfant survivant d’un courtier prospère, homme violent et difficile. Protégé par sa mère, délicat, introverti et studieux, Gray quitta son milieu familial en 1725. Il fut envoyé à Eton où il se lia d’amitié avec Horace Walpole, fils du Premier ministre, et avec Richard West qui partageait son goût pour la poésie.

Ses années à Eton furent sans doute parmi les plus heureuses de sa vie. Il les évoqua, d’ailleurs, non sans les mythifier, dans son Ode sur une perspective lointaine du collège d’Eton  (1747).

En 1734, il se rendit à Cambridge où il étudia l’italien, les poésies française et anglaise ainsi que les auteurs classiques.

Ses premiers poèmes furent même écrits en latin. En mars 1739, suivant la tradition du "Grand Tour", voyage européen obligé des jeunes gens bien nés, il partit avec Walpole, et aux frais de celui-ci, pour la France où il s’enthousiasma pour le monastère de la Grande-Chartreuse et la beauté sublime des paysages alpins, le sublime et le terrifiant devenant la clé de voûte de l’esthétique nouvelle.

Sa découverte des Alpes, avec ses précipices et ses torrents qu’il décrit dans une lettre à West comme des lieux "imprégnés de religion et de poésie", allait être déterminante dans le mûrissement d’une conception de la nature chère aux romantiques, moins fondée sur l’apaisement que sur l’émotion.

De retour à Londres, Gray commença une tragédie, Agrippine , imitation inachevée et injouable du Britannicus  de Racine qu’il avait vu représenter à Paris. Il écrivit aussi l’Ode au printemps , son premier poème important en langue anglaise, méditation souvent ironique sur le choix de vie nécessaire entre action et contemplation.

Le poète n’apporte pourtant pas de réponse et se contente d’indiquer, annonçant ainsi l’Élégie , que la mort sera le lot de tous.

La mort de West, en 1742, plongea Gray dans le désespoir. Il écrivit néanmoins à cette occasion un sonnet très mélodieux dont les images stéréotypées n’ôtent rien à l’expression émouvante de la détresse du poète.

Gray devait ne pas se départir de son pessimisme, voire de sa mélancolie, dans l’Ode sur le collège d’Eton , comme l’atteste l’épigraphe de ce poème, empruntée à Ménandre : "Je suis homme, ce qui suffit pour être malheureux."

Avec l’Ode sur l’adversité, l’attitude de Gray se modifie. La souffrance liée à l’écoulement du temps n’est pas niée, mais elle est considérée avec plus de sérénité comme un lieu d’apprentissage bénéfique pour l’individu dans la conscience de soi.

C’est l’Élégie écrite dans un cimetière de campagne  (1751), dont Samuel Johnson disait que c’était un miroir dans lequel chacun pouvait se reconnaître, qui rendit Gray immédiatement célèbre.

Ce poème de facture classique, méditation sur la tombe des humbles, est une réflexion sur la mortalité de l’homme. Sujet parfois éculé, mais qui échappe aux stéréotypes : point ici d’atmosphère pastorale lénifiante, les pauvres ne sont pas meilleurs que les riches, ils n’ont simplement pas su satisfaire des ambitions qui auraient pu être aussi bien bénéfiques pour l’humanité que criminelles. L’Élégie  tire sa force de son universalité — il s’agit de la mort des autres et de celle du poète lui-même, à la fois conscience unique et souffrante et homme parmi les hommes — et de son immense musicalité qui en font une œuvre d’exception.

Auteur d’un charmant poème héroï-comique, l’Ode sur la mort d’un chat favori , Gray composa en 1757 deux odes pindariques, La Poésie  et Le Barde .

Dans Le Barde  s’exprime l’idée que l’art, même persécuté, engendre à son tour la liberté qui l’avait engendré.

Ces œuvres, parfois obscures, furent accueillies avec réticence.

Passionné par les poésies celtique et scandinave, et auteur de traductions, Gray affirma avec force son intérêt, annonciateur du romantisme, pour le monde "barbare" et le folklore qui commençaient à éclipser les dieux grecs et romains.

Ses dernières œuvres n’ayant pas reçu l’accueil triomphant de l’Élégie , il passa les dernières années de sa vie à Cambridge dans une grande solitude simplement éclairée par l’amitié passionnelle et ambiguë qu’il conçut pour un jeune aristocrate suisse, Victor de Bonstetten.

Il mourut à l’âge de cinquante-cinq ans, le 30 juillet 1771, et fut enterré à Stoke Poges aux côtés de sa mère, dans le cimetière qu’il avait célébré dans son poème.

Cam.

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Dernière modification le 26/10/98, ©camilist 1998 --- une remarque ?
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