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Chroniques du 5 Août.
1630
Louis XIII et Anne dAutriche font un vu en la basilique Notre Dame de Fourvière à Lyon. En reconnaissance du fils obtenu, le Roi consacre la France (" la fille aînée de lEglise ") à la Vierge Marie.
Mais cet édifice est prenant pour bien dautres raisons. La colline de Fourvière, à Lyon, semble sopposer à la Croix-Rousse, la colline du travail, celle des canuts.
La basilique Notre-Dame, qui la domine, attire lattention dabord par ses dimensions imposantes, qui en font une sorte de citadelle de la foi, et par son architecture "triomphaliste" de la fin du XIXe siècle, où se mêlent le roman, le gothique, le byzantin et une sorte de style italien du XVIIe siècle.
Baptisé "la maison dorée" à cause de lexubérance de sa décoration de mosaïques et dors, cet édifice nest pas le véritable lieu sacré de la colline : cest lancienne et modeste chapelle romane de Fourvière qui constitue le centre réel du pèlerinage, avec son clocher surmonté dune vierge dorée qui tend ses deux mains vers Lyon en signe dappel.
La dévotion mariale, en effet, na pas attendu la construction de la basilique, commencée en 1871, pour sépanouir sur cette colline, qui fut un des premiers lieux consacrés à ce culte.
En 135, arrivait à Lyon lévêque Pothin, disciple de saint Polycarpe, lui-même ami de lapôtre saint Jean, qui avait recueilli Marie. Pothin aurait apporté un portrait de la Vierge attribué, comme les autres uvres du genre, à StLuc. Cest de cette époque que date le premier sanctuaire marial de Fourvière.
Pothin, en effet, fut exécuté en 177 sur le forum de Trajan, qui donna son nom à Fourvière (Forum vetus ), et la théologie mariale proprement dite y fut développée par son successeur, saint Irénée, qui mourut comme Pothin dans la prison du Vieux Forum et qui fut le premier docteur à célébrer Marie dans son rôle de nouvelle Ève.
En 840, après lécroulement du Vieux Forum, une nouvelle chapelle mariale fut édifiée. Louis XI la dota richement et, en 1630, Louis XIII et Anne dAutriche y vinrent faire un vu en demandant la grâce davoir un fils. Après la naissance du dauphin, le roi consacra la France à Marie.
Dès 1645, la dévotion propre à Fourvière fait référence à la "Vierge immaculée" et, en 1659, lors de lérection dune statue de la Mère de Dieu, les échevins font graver sur son socle : "à la Vierge conçue sans péché".
En 1854, le dogme de lImmaculée Conception est promulgué, deux siècles après que se fut exprimée la piété lyonnaire au sujet de cette croyance.
En 1871, à la suite dun vu par lequel on avait demandé que la ville fût épargnée par les Prussiens, on entreprend de construire, sur les plans de P. Bossan, la basilique actuelle, qui sera achevée par les architectes Sainte-Marie Perrin, père et fils, et qui sera consacrée en 1896.
Grand centre religieux, auquel demeurent attachés à la fois les habitants de Lyon et ceux des campagnes de la région, Fourvière attire aussi de nombreux pèlerinages étrangers. Les cérémonies traditionnelles qui commémorent le vu de Louis XIII, le 5 août, et le vu des Échevins, le 8 septembre, ont pendant des siècles compté parmi les grands moments dune cité fière, par ailleurs, de voir son archevêque porter aussi le titre de primat des Gaules.
1906
Naissance du Réalisateur américain John Huston. Il fut et reste lincarnation même dun cinéma libre et décontracté et ses films sont autant (ou peu sen faut) de chefs-duvre dhumour dissimulant çà et là une certaine gravité. Certains le tiennent pour le symbole dune des conceptions les plus paresseuses du cinéma.
Mais il y a sans conteste un cas Huston. Tour à tour regardé comme un " génie " (Robert Benayoun) ou comme " un exemple de fumiste " (François Truffaut), ce cinéaste peut à bon droit laisser perplexe : il ne saurait, en tout cas, laisser indifférent.
John Huston est né le 5 août 1906 à Nevada (Missouri) dune mère romancière et dun père excellent acteur de théâtre et de cinéma Walter Huston (1884-1950). John Huston dirigera son père dans " The Treasure of Sierra Madre " (Le Trésor de la Sierra Madre ). Sa jeunesse (fortement marquée par la familiale empreinte irlandaise) comporte des études décousues, le passage à la boxe professionnelle (sur vingt-cinq combats, il nen perd que deux), un engagement dans la cavalerie mexicaine (1926) et un voyage en France " pour étudier la peinture ".
Cest surtout la littérature quil découvre en Europe : il écrit des romans et devient, à len croire, " le plus mauvais des journalistes ". Mais Samuel Goldwyn lengage comme scénariste (1930).
Passionné de whisky, de chevaux, de jeu déchecs et de vie familiale (il se mariera quatre fois), disposant dune culture hâtive et désordonnée mais réelle, Huston va dabord voir ses scénarios réalisés par des metteurs en scène de valeur (Wyler, Florey, Dieterle, Hawks, Walsh). À loccasion de High Sierra , il se lie damitié avec Humphrey Bogart (La Grande Évasion ).
Son contrat avec Goldwyn lui donne le droit de mettre en scène lui-même un film. Ce sera The Maltese Falcon (Le Faucon maltais ), adaptation fidèle, pleine dhumour, dun roman de Dashiell Hammett, avec dexcellents interprètes (Bogart, mais aussi Sidney Greenstreet et Peter Lorre). Le succès du film vaut à Huston den diriger dautres.
Mobilisé pendant la guerre, au retour, il réalise sur les malades mentaux traumatisés par la vie guerrière un documentaire tellement accusateur (Let Be There Light ) que sa diffusion en sera interdite.
La même année (1945), il monte à Broadway " Huis clos " de Jean-Paul Sartre. Sa carrière ne connaîtra plus que des succès.Il devient producteur en créant sa propre maison, " Horizons Pictures ".
Il a tourné avec les plus grands acteurs, dont Marilyn Monroe (" The Misfits ", Les désaxés). Je me souviens encore avec délectation dun extraordinaire " Lhomme qui voulut être Roi " (1975) où il donne à lacteur Sean Connery un tout grand rôle autre que James Bond. Et " Le Cardinal ".
Il mourra à Newport (Rhode Island) en 1987.
1962
Suicide de Norma Jean, plus connue sous le nom de Marilyn Monroe.
Actrice de cinéma américaine née en 1926 à Los Angeles, Marilyn Monroe marque une date dans lhistoire non seulement du cinéma, mais du rapport cinéma-société, voire de la société elle-même. Son aventure, brève et pathétique, na pas été inventée pour les besoins de sa publicité : à distance, il est surprenant mais significatif que ce soit celle de la dernière star de Hollywood (le phénomène Elizabeth Taylor et les vedettariats dactrices plus récentes sétant joués sur dautres plans).
Sa mère étant atteinte de troubles mentaux et son père légalement "inconnu", Norma Jean passe son enfance au sein de plusieurs familles dadoption. Probablement violée alors quelle navait quune dizaine dannées, modèle pour photographes dès 1946, mariée quelques semaines à un riche homme daffaires, elle se retrouve actrice sans expérience et utilisée à rebours de ses possibilités dans de petits films de la Fox, puis de la Columbia (1948) et à nouveau de la Fox.
Un heureux concours de circonstances lui fait tenir des rôles secondaires, mais chaque fois marquants, dans des films intéressants. Quils soient comiques comme La Pêche au trésor (Love Happy , de David Miller, 1948, où Groucho Marx lui déclare : "Un homme vous suit ?... Un seul ?") ou dramatiques comme " Quand la ville dort ", 1950.
Dans " Ève " (All about Eve , de Mankiewicz, 1950), elle apparaît comme la future rivale de lactrice dont le film raconte lascension. Peu à peu, une promotion sorganise autour delle. On la lance à la fois comme la "pin-up intellectuelle" aux reparties osées ("Que portez-vous pour dormir, miss Monroe ? Du parfum Chanel no 5 !") et comme lavatar moderne dun mythe cinématographique cher aux Américains : celui de la blonde faussement sotte, un peu vulgaire, mais bon enfant, à la sexualité candide mais rassurante.
Malgré son mariage avec le joueur de baseball Joe Di Maggio, une éphémère gloire nationale, Marilyn Monroe ne se satisfait pas de cette personnalité doublement factice quon lui a fabriquée. Elle lutilise pour saffirmer à la fois comme femme et comme actrice, et cest en cela que pendant moins de dix ans, elle va dominer les écrans tout en proposant un type de femme détendu (faussement détendu, en ce qui la concerne) qui présage dautres libérations et répond en tout cas à la mentalité de la "génération Kennedy".
Un tel don de sympathie irradie de ses prestations que dans lun de ses rarissimes rôles antipathiques, pour le " Niagara " de Hathaway (1953), elle inspire tout au plus la pitié.
Ses grands rôles relèvent de la comédie : " Chérie, je me sens rajeunir " [Monkey Business ], de Hawks ; " Sept Ans de réflexion " [The Seven Years Itch ] et " Certains laiment chaud " [Some Like it Hot ], de Billy Wilder, éventuellement de la comédie musicale, car elle danse et chante fort agréablement (" Les hommes préfèrent les blondes " [Gentlemen Prefer Blondes ] de Hawks ; " Comment épouser un milliardaire " [Lets Make Love ], de Cukor).
Sa vie privée ne répond nullement à limage enjouée ou tendre quelle donne de lexistence dans ses films, et jusque dans son unique western (" La Rivière sans retour " de Preminger, 1954). Son troisième mariage, avec Arthur Miller, est un nouvel échec, et " Les Désaxés " (The Misfits , 1961) que Huston met en scène sur un scénario du même Miller, sera en partie lhistoire de leur incompréhension mutuelle.
Le film nest guère une réussite pour elle. Au début du tournage de " Somethings Got to Give " , elle se suicide (le 5 août 1962) dans des conditions qui ont donné lieu à trop dhypothèses romanesques.
Il est plus intéressant de constater que, même en Europe où les murs et les goûts évoluent plus vite, les reprises de ses films (après quelques années de "purgatoire") obtiennent un succès constant, où la nostalgie entre pour fort peu de chose.
Cam.
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écrites par Cam (cleclercq@cybernet.be)
Dernière modification le 01/10/98, ©camilist 1998
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