Mois d'Août / sommaire des chroniques / sommaire de Camilist

Chroniques du 25 Août.

Sommaire :

1270

Mort du roi de France Louis VIII, qui deviendra bientôt Saint Louis, et qui fut l’un des plus grands " Capétiens ".

Peu d’hommes ont été aussi bien observés et sont aussi célèbres que Saint Louis, et cependant la personnalité de ce souverain est mal connue. L’homme est complexe, son caractère a beaucoup évolué. Son action est souvent paradoxale, sa réputation ambiguë.

Il y a le saint, l’homme dont la foi ardente et la piété parfois excessive déroutent ses contemporains, le roi croisé, l’adversaire implacable des derniers cathares parce qu’ils sont rebelles à la foi et rebelles à leur roi, l’arbitre de l’Europe.

Bref, l’une des hautes figures de l’histoire de France telle que l’ont vue Joinville et tant d’autres, et une œuvre spectaculaire qu’a retenue l’imagerie.

Mais il y a aussi l’œuvre en profondeur, que les contemporains ont moins nettement perçue et que souligne moins facilement l’anecdote.

C’est celle d’un souverain énergique et scrupuleux qui joue dans la construction de la monarchie française un rôle décisif et qui, s’il n’était le vainqueur de Taillebourg et le constructeur de la Sainte-Chapelle, n’en serait pas moins, entre son grand-père Philippe Auguste et son petit-fils Philippe le Bel, l’un des " grands Capétiens ", peut-être le plus grand.

Né le 25 avril 1214 à Poissy, l’aîné des cinq fils de Louis VIII n’avait que douze ans lors de son avènement, le 8 novembre 1226.

La volonté du roi défunt confia à Blanche de Castille l’enfant et le royaume.

L’éducation reçue sous la responsabilité de la régente marqua profondément Louis IX : elle alliait les pratiques de piété et les œuvres de charité à un apprentissage très sérieux du métier royal – des lettres à l’art du combat – qui fit du jeune roi le modèle du chevalier chrétien, bon cavalier et vêtu selon son rang, aussi capable de disputer de théologie que de conduire une armée, sachant imposer aux barons sa volonté après avoir lavé les pieds des pauvres.

C’est à partir de la croisade qu’une ascèse de plus en plus rigoureuse transforma son aspect, son maintien, sa mise et son mode de vie au point d’ennuyer son entourage et de scandaliser certains de ses sujets qui ne voyaient plus en lui un roi.

Si la reine Blanche exerça jusqu’à sa mort (1252) son influence sur le gouvernement d’un royaume dont elle fut de nouveau régente pendant la croisade, la jeune reine Marguerite de Provence, que Louis IX épousa en mai 1234 et qui lui donna onze enfants, fut pratiquement tenue à l’écart par un époux peu enclin aux effusions familiales et par un roi peu désireux de voir les intérêts de la maison de Provence interférer dans la politique française.

Le roi n’était guère accessible aux avis des barons de son entourage, confidents plus que conseillers. Mais les religieux – dominicains et franciscains – étaient nombreux autour de lui et exercèrent une influence croissante sur son comportement et sur sa politique, cependant que Charles d’Anjou parvenait, à la fin du règne, à mettre au service de ses ambitions une partie des forces du royaume et le prestige du roi son frère.

La politique de Saint Louis est avant tout le reflet d’une certaine morale. N’hésitant pas à recourir à la force, il ne concevait celle-ci que comme l’adjuvant d’une recherche de la paix et de la justice politique dans le respect du droit de chacun et même du droit de ses adversaires.

Toute l’action royale était déterminée par des vues eschatologiques, et, si le roi croisé en venait peut-être à douter des bases théologiques de l’idée de croisade, il ne renonçait pas à convertir par les armes l’infidèle et promulguait des ordonnances qui asservissaient les Juifs du royaume et les privaient de leurs moyens d’existence et de leurs possibilités de vie cultuelle.

Il faisait parfois passer les intérêts matériels de la couronne après le respect du bon droit, mais, persuadé de la haute valeur du charisme royal, il voyait dans le renforcement du pouvoir monarchique la voie qui lui permettrait d’assurer le salut des âmes.

Il ne craignait donc pas de s’opposer au pape et aux évêques de France afin de faire respecter ses prérogatives propres et son indépendance politique et financière.

L’homme est donc pétri de contradictions, beaucoup plus sensible à l’analyse de son comportement qu’à la lecture de ces " Enseignements "  qu’il fit rédiger afin de transmettre à ses enfants ses principes de morale politique autant que de vie privée.

Mort à Tunis le 25 août 1270, Louis IX fut immédiatement vénéré comme un saint. Boniface VIII le canonisa le 11 août 1297 pendant une accalmie au cours de la lutte qui l’opposa à Philippe le Bel, mais cette décision de circonstance avait été préparée par une longue enquête et un véritable procès de canonisation.

1883

Le 25 Août, l’Amiral français Courbet, force l’entrée de la rivière Huê qui protège la ville " impériale " de la dynastie des Nguyen et contraint la cour à accepter le 1er Protectorat français sur le Vietnam, qui est toujours en principe sous tutelle de la Chine.

1891

Naissance à Athènes, du poète, écrivain, musicien compositeur, Alberto Savinio (" Hermaphrodito ").

Grec d’adoption, son vrai nom était Andrea de Chirico. Son père était un ingénieur ferroviaire florentin ; d’où l’importance que prennent souvent les trains et les gares dans son œuvre. Son frère, le célèbre peintre, fut lui aussi fortement inspiré par l’activité de son père, puisqu’il est connu comme le peintre des gares. Et de la même manière que Giorgio créa la peinture métaphysique, Andrea créa l’écriture métaphysique.

Au conservatoire de sa ville natale, le jeune Savinio étudia le piano et la composition.

Après la mort de son père en 1905, il partit rejoindre Max Reger à Munich pour se perfectionner.

À quinze ans, il avait déjà composé " Carmela " , et ne cessera par la suite de produire des œuvres musicales : " La Vita dell’uomo "  (La Vie de l’homme), 1946 ; " Orfeo Vedovo "  (Orphée veuf), 1950 ; " Cristoforo Colombo "  (Christophe Colomb), 1952, mais aussi " Notte tinta "  (Nuit teintée), " Le Fanal d’épiderme " , pièces jamais exécutées dont la musique est inédite.

L’œuvre de Savinio se révèle d’emblée particulièrement riche et son activité artistique s’exerce dans de nombreux domaines. La musique, la littérature, la peinture ou la mise en scène sont autant de disciplines dans lesquelles ses talents s’expriment.

Peu à peu, cependant, la littérature et la peinture prirent le pas sur la musique.

L’intérêt de Savinio pour celle-ci n’en continua pas moins à se manifester au gré de textes critiques dont la plupart ont été rassemblés et édités en recueil : " Scatola sonora "  (Boîte sonore).

En 1915, la guerre interrompit ses activités et il partit combattre en Macédoine. Au lendemain de la guerre, il publia Hermaphrodito  (" Hermaphrodite ", 1918).

Au moment de sa parution, le livre tomba dans l’indifférence générale et seuls quelques initiés et amis surent, comme Apollinaire, Cocteau ou Breton, apprécier l’œuvre à sa juste valeur.

Savinio arriva à Paris en 1926 et c’est en 1927 qu’eut lieu sa première exposition de peinture, présentée par Cocteau, et qui fut un succès.

L’Italie, qu’il avait rejointe au lendemain de la guerre et quittée en 1926, l’accueillit à nouveau. Il s’installa à Milan puis, en 1937, à Rome où il mourut le 6 mai 1952.

L’œuvre d’Alberto Savinio couvre pratiquement la première moitié du XXe siècle. Savinio fut à la fois acteur et spectateur des deux guerres les plus meurtrières que connut l’humanité : témoin de l’effondrement d’un monde et de ses valeurs, témoin de ce qu’il est convenu d’appeler aujourd’hui une crise de civilisation.

Ceci explique cela, et si son œuvre est disparate, c’est qu’elle est l’expression de cette crise.

Sa quête à travers les méandres de la culture humaine, que celle-ci soit étrusque, égyptienne, hébraïque, grecque, romaine ou nordique, est la quête de l’homme moderne en proie à l’angoisse, partant à la recherche de son identité et à la découverte de valeurs nouvelles adaptées au monde d’aujourd’hui.

Ces valeurs, Savinio les découvre et les concentre dans une nouvelle synthèse incarnée dans un univers poétique.

Dans la constitution de cet univers, la Grèce joue un rôle prépondérant, car c’est à Athènes que naquit Savinio et qu’il passa son enfance et son adolescence.

La Grèce le marqua donc profondément et il n’est guère de ses écrits qui ne fassent référence à la Grèce actuelle et plus encore à la Grèce antique.

Les dieux de l’ancienne Grèce peuplent ses récits et reprennent une vie parfois étrange sous sa plume.

À travers toutes les mythologies, Savinio se fraye un chemin et crée sa propre mythologie, nourrie d’une force poétique si vigoureuse qu’André Breton a pu dire de lui, dans son Anthologie de l’humour noir , que " tout le mythe moderne encore en formation s’appuie à son origine sur les deux œuvres, dans leur esprit presque indiscernables, d’Alberto Savinio et de son frère le peintre Giorgio de Chirico ".

Cette déclaration suffirait à elle seule à justifier l’étiquette d’écrivain métaphysique que Savinio ajoutait à son nom.

Cam.

Mois d'Août / sommaire des chroniques / sommaire de Camilist


Toutes ces chroniques ont été écrites par Cam (cleclercq@cybernet.be)
Dernière modification le 04/10/98, ©camilist 1998 --- une remarque ?
jrmasson@nordnet.fr !