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Chroniques du 11 Octobre.

Sommaire

1303

Mort à Anagni du pape Boniface VIII, giflé par Nogaret, l’envoyé du Roi de France, Philippe le Bel.

Les relations entre le pape Boniface VIII et Philippe le Bel s’étaient d’abord maintenues avec des hauts et des bas. Et par égard pour le roi de France, le pape avait en 1298 canonisé son grand-père, Louis IX. Mais les sollicitations financières de plus en plus pressantes faites par Philippe le Bel à l’Église de France se heurtaient aux sollicitations symétriques des finances pontificales, elles aussi alourdies par le développement de la centralisation romaine. La rigidité du Conseil royal et les maladresses du pape et de la Curie amenèrent une série de crises graves.

L’enjeu en était pour la royauté française l’attachement du clergé au royaume et l’indépendance du monarque dans le gouvernement de tous ses sujets. En 1296, le pape interdit par la bulle Clericis laicos  le versement par les clergés français et anglais de subsides à leurs souverains. Philippe le Bel ayant réagi vivement, Boniface fit machine arrière en 1297, mais, au cours de l’affaire, des arguments en faveur, d’une part, du droit d’immixtion du pape dans les affaires temporelles des princes et, d’autre part, de la souveraineté des princes laïques dans leurs États envenimèrent les choses.

L’arrestation et la condamnation de Bernard Saissel, évêque de Pamiers, en conflit avec le comte de Foix et le roi de France son suzerain pour des droits sur la ville de Pamiers, entraînaient à nouveau en 1301 une bulle, Ausculta fili , où était réaffirmée la supériorité du pape sur le roi. Philippe le Bel et ses conseillers réagirent en convoquant les assemblées des trois états qui, en 1302 et 1303, appuyèrent à fond – même dans la grande majorité du clergé – la politique royale.

Boniface VIII aggrava la tension par une nouvelle bulle reprenant les formules de " théocratie pontificale " élaborées depuis Grégoire VII : Unam Sanctam  (nov. 1302). Le roi de France lança alors un appel à un concile général qui devait juger le pape, accusé d’hérésie, simonie, crimes de toutes sortes.

Guillaume de Nogaret fut envoyé en Italie pour s’assurer de la personne du pape et le garder en vue du concile. Avec l’aide des ennemis italiens de Boniface VIII (des nobles romains, les Colonna, surtout), il fit prisonnier le pape dans son palais d’Anagni, le 7 septembre 1303. Au cours de l’arrestation, Sciarra Colonna frappa le pape et Nogaret fut accusé, selon une légende probablement fausse, de l’avoir giflé. Dès le 9 septembre, Boniface fut délivré par ses partisans. Brisé par l’épreuve, le pape mourut à Rome le 11 octobre.

1962

Ouverture du Concile Vatican II. La modernisation de l’Eglise, l’aggiornamento !

Ce mot italien choisi par le pape Jean XXIII pour désigner l’un des trois objectifs qu’il assignait au concile : la modernisation de l’Église catholique, son ouverture aux autres Églises (œcuménisme) et au monde. Le terme avait été choisi à dessein, pour en éviter d’autres, en premier lieu celui de "modernisation", qui évoquait trop les mauvais souvenirs de la crise moderniste du début du XXe siècle, mais aussi celui de "réforme", qui avait une saveur trop protestante et supposait toutes les distinctions que le père Congar avait introduites dans un livre marquant, Vraie et Fausse Réforme dans l’Église  (1950, réédité dès l’annonce du concile). Aggiornamento , qui fit rapidement fortune dans tout le monde catholique, demeurait plus modeste et dépourvu de tout précédent historique : "mise à jour" des structures, des orientations, du langage et des formes d’action du catholicisme.

Le concile Vatican II s’ouvrit le 11 octobre 1962 et dura jusqu’au 8 décembre 1965 ; son œuvre se répartit sur quatre sessions. Dès le début, se dégagea une forte majorité en faveur de l’aggiornamento , malgré la résistance d’une minorité : la présence d’observateurs orthodoxes et protestants, le refus de prononcer des condamnations (anathèmes), un message au monde (Lumen gentium ) apparurent comme le signe évident qu’un tournant était pris, du moins qu’une page était tournée. Tout à l’espérance, le concile ignorait que les événements allaient vite dépasser ses intentions : il avait libéré des forces et des aspirations qu’il ne soupçonnait pas.

1963

3 monstres sacrés meurent le même jour, la fin d’une époque.

Le 11 octobre 1963 avait lieu, à Cuverville, la vente aux enchères de la bibliothèque d’André Gide. Le même jour, à Milly-la-Forêt, une crise cardiaque terrassait Jean Cocteau. L’avenir n’aura pas de peine à voir là la fin d’une époque, que Cocteau couvrit tout entière et dont il fut peut-être le porte-parole le plus éloquent. Osant la vivre, osant affronter toutes ses formes d’expression, il l’habita si exactement qu’on a peine à présent à l’en détacher. Il avait pris la précaution de naître en 1889, la même année que Charlie Chaplin. Il prendra celle de mourir en même temps que Francis Poulenc et qu’Édith Piaf.

Jean Cocteau est écrivain, dessinateur et cinéaste français. Son succès, sa vie durant, fut toujours lié à une réputation d’artiste brillant et superficiel.

Né le 5 juillet 1889, dans une famille de musiciens, Jean Cocteau fut élevé par sa mère, son père s’étant donné la mort en 1898. Après ses études secondaires, il entra en poésie "comme on entre dans les ordres", avec un premier recueil publié à 20 ans, "la Lampe d’Aladin", 1909 qui témoignait déjà d’un goût très sûr et d’un réel talent. Loin de se concentrer exclusivement sur son œuvre littéraire, Cocteau manifesta très tôt des dons et des goûts très éclectiques : il s’adonna à la poésie, " le Prince frivole " en 1910 et pratiqua aussi très tôt le roman ("le Potomak", 1919), l’essai et le dessin ; mais il n’aborda le cinéma que plus tard. Il s’intéressa aussi à la danse, fasciné par les Ballets russes menés par son ami Serge de Diaghilev (qui lui "déniaisa l’esprit"). Il eut en effet l’occasion d’admirer Nijinski dans " le Spectre de la rose " et " le Sacre du printemps " (1913).

Proche du mouvement Dada, il créa avec les dadaïstes le ballet Parade (1917), où se font sentir les influences conjointes de Diaghilev et de Stravinski, et auquel collaborèrent ses amis Satie et Picasso (Cocteau composa une Ode à Picasso en 1919). C’est également avec les dadaïstes qu’il composa l’argument de deux autres ballets illustrant l’atmosphère des Années folles, le Bœuf sur le toit et les Mariés de la tour Eiffel en 1924). Ces œuvres composites, mêlant théâtre, musique et danse de façon inédite choquèrent par leur avant-gardisme.

Initié à l’acrobatie aérienne par Roland Garros, il tira de cette expérience un recueil de vers (" le Cap de Bonne-Espérance ", 1919), sorte de "tentative d’évasion" symbolique vers le ciel de la poésie, opposé au retour sur terre présenté comme une "invitation à la mort".

C’est la diversité de sa propre production mais aussi son omniprésence dans les événements culturels les plus variés qui valurent très vite à Cocteau une réputation de superficialité.

Très affecté par la mort de Raymond Radiguet, en 1923, Cocteau chercha refuge dans l’opium, "La Chine fume pour se rapprocher de ses morts", "Opium", en 1930), et dans la religion (Lettre à Jacques Maritain, 1925). C’est la perte de cet être cher qui lui inspira " Orphée " (1927). En 1929, son roman " les Enfants terribles " lui valut un succès considérable. Dans les années 1930, il continua d’écrire pour le théâtre, avec des pièces comme " la Voix humaine " (1930) ou " la Machine infernale " (1934), qui réactivaient les mythes de la Grèce antique, ou encore " les Chevaliers de la Table ronde " (1937), où il proposait une réécriture des légendes médiévales. On lui doit aussi des drames modernes, comme " les Parents terribles " en 1938.

Il se mit également à écrire ou à réaliser des films, toujours imprégnés d’une mythologie intime et exploitant volontiers le thème de l’amour impossible (le Sang d’un poète, 1930 et l’Éternel Retour, 1943). "La Belle et la Bête" (1945), "Orphée" (1950), film qu’il réalisa d’après sa pièce du même nom et "le Testament d’Orphée" (1959).

Ce touche-à-tout génial et volontiers provocateur fut pourtant élu à l’Académie française en 1955.

1969

Le 11 octobre 1969, l’Union soviétique lançait dans l’espace Soyouz-6, avec deux hommes à bord : le cosmonaute Gueorgui Chonine et l’ingénieur Valery Kubarov. Le 12 octobre, Soyouz-7, emportant Anatoli Filipchenko, Vladislav Volkov et Victor Gorbatko, était lancé et mis sur une orbite voisine de celle de Soyouz-6. Le 13 octobre, un autre vaisseau, Soyouz-8, avec deux hommes à son bord (Vladimir Chatalov et Alexis Eliseev) rejoignait les deux précédents.

Pour la première fois, on assistait à un vol groupé de trois vaisseaux spatiaux. Soyouz-6 revenait sur la Terre le 16 octobre, après plusieurs essais de soudure de métaux dans le vide. Soyouz-7 et Soyouz-8 le suivaient à un jour d’intervalle chacun. La mission était de préparer la construction d’une plate-forme spatiale permanente, par exemple Saliout-6, à partir de laquelle des cosmonautes mèneraient des activités continues de recherche scientifique, d’observation et de surveillance de la Terre. Le vaisseau Soyouz permet des manœuvres dans l’espace et comprend une capsule de descente abritant les membres de l’équipage.

Cam.

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