Mois de Mars / sommaire des chroniques / sommaire de Camilist

Chroniques du 14 Mars.

Sommaire :

1244

La prise du château de Montségur, la fin d’une croisade, le début d’une légende.

Bâti sur un piton calcaire, à plus 1 060 m d’altitude, dans les Pyrénées ariégeoises, à trente kilomètres à l’est de Foix, le site du château de Montségur est grandiose et permet de dominer tout le pays d’Olmes (Lavelanet-Mirepoix).

Cette construction superbe et très robuste fut faite à la fin du XIIe siècle pour servir de demeure seigneuriale et de forteresse. Aujourd’hui, il reste essentiellement la grande salle et le donjon.

À partir de 1232, les Cathares obtinrent du seigneur de Péreille la permission de s’y réfugier. Après l’échec du soulèvement de 1240-1242, plusieurs milliers de croisés (la Croisade des Albigeois) vinrent assiéger Montségur. Mais le site était si inaccessible qu’environ 150 hommes d’armes — il y avait en tout 500 personnes dans le château — les tinrent en échec pendant près d’un an (13 mai 1243-14 mars 1244). Encore ne capitulèrent-ils qu’après de longues négociations et la prise par traîtrise de la barbacane.

Ils durent livrer environ 200 hérétiques qui, refusant d’abjurer, furent brûlés le 16 mars, mais ils obtinrent pour eux les honneurs de la guerre. Ce drame est devenu le symbole de la patrie occitane meurtrie mais restée fière.

Il n’en fallait pas plus pour créer la légende de Montségur : lieu où les Cathares enfouirent leur trésor et assimilé au merveilleux Montsalvat où était présent le Graal, temple solaire même. Des historiens comme Delaruelle ont fait justice de ces légendes. Mais un certain public, local surtout, soit par nostalgie de l’Occitanie, soit par religiosité cathare, soit encore par anticléricalisme, reste avide de ce merveilleux. La sauvage beauté du paysage aidant, Montségur est devenu un véritable lieu de pèlerinage.

D’autres erreurs doivent cependant être redressées. Montségur ne marque pas un tournant dans la guerre contre les albigeois. C’est la bataille de Muret (12 sept. 1213, consultez la Chronique de ce jour) qui aurait dû figurer dans "les trente journées qui ont fait la France". Quant au "bûcher de Montségur", il s’agit en fait d’un raccourci historique. Y. Dossat semble avoir prouvé qu’il eut lieu à Bram (60 km au nord). Le "champ de cremats" (brûlés) en contrebas du château serait une légende. Enfin l’Inquisition, bien qu’elle ait exercé un minimum de procédure, ne peut être rendue entièrement responsable d’une exécution qui ressemble fort à une représaille militaire. La famille de Montfort, chef au nom de Roi de la Croisade avait laissé beaucoup de morts (et d’argent) dans cette Croisade et voulait récupérer son investissement.

1751

La découverte d’un oasis, au rôle commercial et militaire " impérial ", Palmyre, en Syrie.

L’étonnement que l’Anglais Robert Wood ressentit lors de la découverte des ruines de Palmyre, le 14 mars 1751, fut partagé par tous les voyageurs qui lui succédèrent dans cette oasis du désert de Syrie, avant que les fouilles françaises, polonaises, suisses et syriennes ne fassent mieux connaître l’urbanisme de cette ville, marqué par de grandes voies à colonnades, les temples et les tombeaux, avec leur architecture et leur sculpture originales. Toutes ces constructions remontent aux IIe et IIIe siècles de notre ère, époque à laquelle Palmyre, après de longs siècles d’obscurité, conquit un rôle commercial et militaire de premier ordre. Au milieu du IIIe siècle, la ville était devenue le boulevard de l’Empire en Orient, et ses chefs allaient prendre la direction du monde romain quand l’empereur Aurélien la brisa irrémédiablement en 273.

Palmyre, cité antique de Syrie, est située dans une oasis à l'extrémité septentrionale du désert de Syrie, à 240 km au nord-est de Damas. Selon la tradition, elle fut fondée par le roi d'Israël Salomon.

Dénommée Tadmor (" la Cité des palmiers ") dès le IIIe millénaire av. J.-C., elle apparaît sous le nom de Tamar dans la Bible (1er livre des Rois, IX, 18) ; des Syriens hellénisés l'appelèrent Palmyre (du grec Palmura).

Importante étape caravanière au Ier siècle av. J.-C., elle devint un avant-poste romain puis une cité-État au sein de l'Empire (Ier siècle apr. J.-C.). Détenant le monopole du commerce caravanier entre l'Inde et la Méditerranée (v. 127 av. J.-C.), Palmyre gagna en prospérité et connut son apogée sous Odenath et sa seconde épouse Zénobie. Allié de Rome, Odenath reconquit les possessions romaines perdues face au roi de Perse Chahpour Ier (241-272). Après l'assassinat d'Odenath, la reine Zénobie, tenta de réaliser son ambition d'étendre l'influence de Palmyre en Asie Mineure et en Égypte. Mais elle fut stoppée par l'empereur Aurélien, qui la fit prisonnière (272) et rasa la ville en 273.

En 634, Palmyre fut prise par les Arabes et mise à sac par Tamerlan. Le temple du dieu Soleil (Bêl) et la colonnade de près de 1,6 km de long, constituée de quelque 1 500 colonnes corinthiennes, subsistent toujours. Palmyre vouait une place importante au culte de ses morts comme en témoigne la présence de tours funéraires à étages et d'hypogées renfermant les bustes des défunts.

1804

La naissance à Vienne du père d’une prodigieuse dynastie musicale, Johann Strauss.

Directeur des Bals de la Cour Impériale dès 38 ans, l’auteur de la célèbre " Marche de Radetszky " (il fut aussi chef de la Musique de la Garde Civique) est mort à Vienne de la fièvre scarlatine, le 25 septembre 1849. J’en ai parlé dans cette chronique anniversaire. Vous pouvez vous y référer.

1939

L’évêque Joseph Tiso, pronazi notoire, devient président de la République Tchèque.

Né en 1887, dans une famille modeste, Josef Tiszo (à la hongroise) est ordonné prêtre en 1910. Étudiant brillant, il part pour Vienne où il devient docteur en théologie. Il est marqué alors, comme Hitler, autre "Viennois", par la personnalité du professeur et homme politique autrichien Lueger, puissant organisateur et démagogue antisémite.

Aumônier militaire en 1914, il se rend sur le front russe puis en Slovénie, où le mouvement national chrétien de Korosec l’impressionne durablement. Il se fait l’avocat de l’économie de guerre et du militarisme dans ses articles du "Nyitramegyei szemle"  en 1916. Professeur de théologie à Nitra en 1918, l’ex-secrétaire du comte Batthanyi reste longtemps partisan de la Grande Hongrie et de sa culture. En 1919 qu’il quitte le Parti chrétien social hongrois pour le nouveau Parti populaire chrétien slovaque entièrement dominé par le père A. Hlinka et par le clergé slovaque.

Tiso en devient très vite l’idéologue et le tribun. Il marie le solidarisme chrétien des encycliques de Léon XIII et de Pie XI et les enseignements de saint Ignace de Loyola avec un nationalisme d’autant plus ombrageux que l’autonomie promise par Masaryk en juin 1918 (déclaration de Pittsburgh) reste lettre morte.

Le fougueux rédacteur en chef du journal Nitra , devenu en 1924 doyen et inspecteur ecclésiastique à Bànovce, en appelle aux Slovaques émigrés (voyage aux États-Unis) et à l’Italie, dont il copie les " fasci "  (en créant la Rodobrana). Ses positions antitchèques lui valent alors de nombreux séjours en prison. Il est libéré en 1925 et devient député avec vingt-deux autres populistes (ludàci ) ; de 1927 à 1929, il est ministre de la Santé.

Auteur de " l’Idéologie du Parti populaire slovaque ", il réalise l’union des autonomistes slovaques en 1932 et s’assure du soutien de 50 à 52 p. 100 des électeurs slovaques.

En 1938, il mène de front les négociations avec Benes et avec les partis pronazis des minorités nationales, avec lesquels il est en contact dès 1935. Pendant l’été, il combat la mobilisation contre l’Allemagne et commence à prôner le slovaquisme intégral contre l’État tchécoslovaque.

À la mort de Hlinka, Tiso devient le président et le "guide" du Parti populaire slovaque de ce dernier. Avec lui, l’élément cléricalo-corporatiste et gradualiste prévaut sur l’élément pronazi et prohongrois.

Président du gouvernement autonome slovaque après Munich, il fait du Parti populaire le parti unique. Après le coup de force du 6 octobre 1938, il est le seul maître du pays et s’entoure d’une diète où ne siègent que ses partisans et le Deutsche Partei. Il supprime toutes les libertés démocratiques, mais doit céder en novembre 1938 une partie importante du pays à ses voisins hongrois, polonais, et même à l’Allemagne, qui s’appuie alternativement sur la Hongrie et sur lui. Le 10 mars 1939, le gouvernement tchécoslovaque déliquescent le démet de ses fonctions en recourant à une intervention militaire. Hitler force la main à Tiso réfugié dans un monastère de Bratislava, l’enlève quasiment, le fait venir à Berlin et l’oblige à brûler les étapes.

Tiso, président de la République slovaque fondée le 14 mars 1939 sur l’ordre de Hitler, se place sous la protection de l’Allemagne et envahit avec elle la Pologne en septembre. Après la rencontre de Salzbourg entre Hitler, les pronazis du parti du président et Tiso lui-même, celui-ci se maintient au pouvoir au prix de l’adoption explicite de l’idéologie nationale-socialiste et de la participation à la guerre contre l’U.R.S.S. et les démocraties occidentales.

Prêcheur écouté d’un peuple très croyant, Tiso parvient à conserver l’aspect clérical du régime tout en donnant au Reich plus de gages que ce dernier n’en réclame : "Code juif", camps de concentration, visite de l’Ukraine occupée où il échappe de peu à un attentat, etc. Jouissant de la confiance de Hitler, il est en butte, pourtant, aux tentatives de putsch des nazis de son parti et à l’activité grandissante de la résistance armée. Confronté au soulèvement national slovaque (fin août 1944), il nomme son cousin Premier ministre et appelle les divisions SS qui contrôlent désormais le pays tout entier. Mais le charme est rompu : l’armée rejoint en grande partie les partisans et la répression sanglante menée par la milice fait oublier les bienfaits relatifs du système sur le plan économique.

Homme d’un caractère entier bien qu’aimant l’argent (il contrôle personnellement le système bancaire), parlementaire habile mais dont l’indépendance est annihilée au fil des concessions et compromissions, ce prélat orgueilleux refuse tout compromis avec la Résistance tchécoslovaque.

Le 5 avril 1945 (pour les tout premiers de Camilist, j’en ai parlé il y a 11 mois), il s’enfuit en Autriche et reste solidaire de l’Allemagne jusqu’au bout, espérant que les États-Unis feront bloc avec les restes de l’"Europe Nouvelle" contre le "panbolchevisme". En octobre 1945, le commandement américain de Bavière le livre à la Tchécoslovaquie. Lors de son procès, il se refuse à toute autocritique, plaidant la nécessité du "moindre mal". Il est exécuté le 18 avril 1947, conservant jusqu’à la fin le soutien du Vatican, du clergé et d’une partie non négligeable de la population slovaque.

Cam.

Mois de Mars / sommaire des chroniques / sommaire de Camilist


Toutes ces chroniques ont été écrites par Cam (cleclercq@cybernet.be)
Dernière modification le 05/04/99, ©camilist 1998 --- une remarque ? jrmasson@nordnet.fr !