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Chroniques du 20 Mars.

Sommaire :

1804

L’exécution du Duc d’Enghien, une tragédie nécessaire à la grandeur de Napoléon 1er ?

Ce problème reste encore posé, près de deux siècles après cette exécution. D’autant plus que le duc d’Enghien n’était pas le conspirateur dont Napoléon désirait faire un exemple.

Louis Antoine Henri de Bourbon, duc d’Enghien, né en 1772, dernier descendant de la maison de Condé, émigra avec sa famille dès les premières heures de la Révolution. De 1792 à 1801, il s’illustre dans toutes les campagnes menées par l’armée de Condé formée par son grand-père. Le refrain chanté par ses soldats le dépeint mieux qu’un portrait :  "Nous partons conduits par Enghien" // "Il aime l’amour et le vin"  // "Il aime bien aussi la gloire".

Après la dissolution de son armée, le prince se retire à Ettenheim, dans le grand-duché de Bade. En attendant de reprendre du service contre la République, il file le parfait amour avec Charlotte de Rohan. À Paris, des conjurés, dont Pichegru et Cadoudal, attendent le moment opportun pour enlever ou assassiner le Premier consul. L’Angleterre, qui a rompu la paix d’Amiens, est l’âme de la conspiration. Des rapports de police alarmants affluent sur le bureau de Bonaparte. Georges Cadoudal est arrêté le 9 mars 1804 et déclare qu’il attendait, pour agir, l’arrivée d’un prince français à Paris. Est-ce Artois, Berry ou Enghien, le plus brillant, celui en qui certains royalistes voient un prétendant ?

Un rapport justement signale auprès de lui la présence du traître Dumouriez. Bonaparte réunit un conseil où sont présents Talleyrand et Fouché ; c’est là qu’il aurait eu ce mot en parlant des Bourbons : "Mon sang vaut bien le leur. Je vais leur rendre la terreur qu’ils veulent m’inspirer." À cet instant sa décision est prise ; le plan d’exécution, rapidement et minutieusement élaboré, est transmis par le ministère de la Guerre au général Ordener et au marquis de Caulaincourt chargés de l’exécuter.

Le 15 mars au petit matin, le prince est enlevé dans son lit, ses papiers saisis. Sur le chemin du retour, le prisonnier passe deux jours à Strasbourg. Pendant ce temps, son dossier, parvenu entre les mains du Premier consul, indique que le prétendu Dumouriez est un général Thumory de la suite du prince et dont les espions ont mal compris le nom ; Enghien nie toute participation au complot, indigne de l’honneur d’un soldat. Qu’importe, les dés sont jetés.

Le colonel de la gendarmerie d’élite, Savary, est désigné comme l’exécuteur des hautes œuvres. Le général Hulin, un jacobin de la première heure, préside la commission militaire chargée de juger le prisonnier "sans désemparer". Lorsque, le 20 mars, vers cinq heures de l’après-midi, il est incarcéré au fort de Vincennes, le peloton d’exécution est commandé, la fosse est creusée. À minuit le prince comparaît devant ses juges. Encore une fois, il déclare que les méthodes des conspirateurs lui font horreur, mais ajoute qu’il se tient prêt à reprendre les armes aux côtés de l’Angleterre. Le tribunal tient son motif, il prononce la peine de mort. Pour encourager le zèle de Hulin, Savary se tenait derrière son fauteuil et, pressé d’en finir, lui aurait même arraché la plume des mains. Toujours pour en finir plus vite, un prêtre est refusé au condamné qui est conduit "sans désemparer" au lieu de son supplice. Tout est fini avant le jour.

Quelques heures auparavant, le prince avait demandé une entrevue avec le Premier consul : "Mon nom, mon rang, ma façon de penser et l’horreur de ma situation me font penser qu’il ne se refusera pas à ma demande." De son côté, Bonaparte aurait dépêché un messager chez Réal, le chef de la police, pour lui demander d’aller en personne interroger le prisonnier et surseoir à l’exécution. Mais Réal, fatigué, aurait consigné sa porte et n’aurait trouvé le message que trop tard. Le dernier mot de la tragédie appartient à celui qui, au terme de sa vie, a voulu en assumer toute la responsabilité : "C’était un sacrifice nécessaire à ma sécurité et à ma grandeur."

1811

La naissance de Napoléon II, l’Aiglon, empereur des français sans avoir régné et mort à 21 ans.
L’Aiglon, le fils de l’Aigle, rappelle les insignes impériaux, les aigles.

J’en ai parlé à l’occasion de sa mort, le 22 juillet (1832). Référez-vous à cette Chronique.

1956

Un mois après le Maroc, la Tunisie accède enfin à l’Indépendance.

Les années d’après-guerre furent avant tout celles de la reconstruction. L’effacement du Néo-Destour, le parti dominant, celui de l’indépendance, l’exil volontaire de Bourguiba en mai 1945 permirent à la trêve politique de se prolonger. Mais les nationalistes conservaient leur influence et, dès son retour, en septembre 1949, Bourguiba retrouvait son autorité et sa popularité. Le programme qu’il présentait en avril 1950 visait à restituer aux Tunisiens la gestion de leurs propres affaires ; mais il fut déçu par les propositions françaises. Au début de 1952, il engagea à nouveau le fer lorsque la démission d’un résident libéral, Louis Périllier, parut fermer la voie des négociations.

Une nouvelle épreuve de force commençait. Le résident Jean de Hauteclocque ordonna l’arrestation des animateurs du Destour, tandis que la troupe était chargée du maintien de l’ordre. Cependant, après des mois de marchandages, le gouvernement français finissait par trouver une transaction qui obtenait l’agrément du bey et d’un parti de notables. Mais le Destour persistait dans son opposition. En ville, le terrorisme s’installait ; dans le bled, quelques bandes de fellagha  commençaient de battre la campagne. Visiblement la situation se détériorait, tandis qu’à Paris, sous le coup des événements d’Indochine, le gouvernement et l’opinion s’abandonnaient au découragement. C’est alors que la démission du cabinet Laniel, conséquence de la chute de Diên Biên Phu, amenait Pierre Mendès France au pouvoir, le 18 juin 1954.

Dès lors, les événements allaient se précipiter. Après de discrets pourparlers avec Bourguiba, Mendès France fit le voyage de Tunis pour annoncer au bey l’intention de son gouvernement d’accorder à la Régence une autonomie sans restriction (discours de Carthage, 31 juillet 1954). L’essentiel était dit, mais il restait encore à négocier. Les accords qui furent signés en juin 1955 devinrent caducs avant même d’avoir été appliqués. Le Maroc ayant obtenu son indépendance par les accords de la Celle-Saint-Cloud, la Tunisie pouvait prétendre, elle aussi, à son émancipation. Le protocole du 20 mars 1956 abolissant le traité du Bardo reconnaissait l’indépendance totale du royaume de Tunis. Un an plus tard, le bey Lamine était déposé et une république proclamée, dont la présidence revint aussitôt à Bourguiba.

Cam.

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Toutes ces chroniques ont été écrites par Cam (cleclercq@cybernet.be)
Dernière modification le 05/04/99, ©camilist 1998 --- une remarque ? jrmasson@nordnet.fr !