Mois de Septembre / sommaire des chroniques / sommaire de Camilist

Chroniques du 30 Septembre.

Sommaire :

30 Septembre :

Fête de Saint Grégoire l’illuminateur. Né en 260, en Arménie, Grégoire fut élevé chrétiennement à Césarée de Cappadoce, se maria et eut deux enfants. Quand " Tiridate " remonta sur le trône de ses pères, Grégoire l’accompagna en Arménie.

Le roi, qui était païen, voulut restaurer les fêtes de la déesse Anahit. Chrétien, Grégoire refusa d’y participer. Il fut jeté dans une fosse, où il resta enfermé pendant quinze ans, et n’en fut libéré que quand Tiridate malade le fit venir. Grégoire le guérit miraculeusement et fut élu pasteur suprême, catholicos , des Arméniens. Il alla se faire ordonner évêque à Césarée de Cappadoce, d’où il rapporta des reliques de saint Jean-Baptiste et du martyr Athanagène. Si l’Église d’Arménie existait avant Grégoire, elle avait beaucoup souffert de la persécution ; il en fut vraiment l’organisateur, créa des évêchés et opéra de nombreuses conversions.

La principale fête de Grégoire fut fixée au 30 septembre. La légende a certainement embelli l’histoire de saint Grégoire l’Illuminateur. Il n’en reste pas moins que son action fut importante et que c’est à juste titre qu’il est considéré comme l’apôtre de l’Arménie. L’Église arménienne autonome porte toujours en son honneur le qualificatif de grégorienne.

1915

Disparition, à 285 ans, de la doyenne des gazettes, " La Gazette ". Le premier grand journal français, fondé en 1631, par Théophraste Renaudot, meurt, exsangue, des problèmes liés à la guerre. Lisez à ce propos, les chroniques du 30 Mai (1631) à propos de sa naissance.

1935

Création mondiale d’une œuvre incommensurable : " Porgy and Bess " de Gershwin. Lisez à propos de Gershwin, la Chronique du 26 Septembre (1898) à l’occasion de sa naissance.

1953

Plongée en Méditerranée à 3150 mètres.

Le professeur Piccard, d’abord associé aux travaux du F.N.R.S. III  en tant que conseiller scientifique, demanda à reprendre sa liberté pour faire construire un bathyscaphe en Italie. On apprit alors par la presse que cet engin, appelé le " Trieste " , avait plongé en Méditerranée, jusqu’à 3 150 mètres, le 30 septembre 1953, au large de l’île de Ponza (avec, à son bord, le professeur Auguste Piccard et son fils Jacques). La course aux grandes profondeurs était désormais engagée.

Le Trieste , après de nombreuses plongées en Méditerranée, fut racheté en 1958 par la Marine américaine, et il fut doté d’une nouvelle sphère construite par Krupp en Allemagne. En octobre 1959, le nouveau " Trieste "  était prêt et, le 23 janvier 1962, il effectuait une descente limite de 10916 mètres, dans la plus profonde des fosses, celle des Mariannes, près de Guam.

Le bathyscaphe américain était piloté par Jacques Piccard et le Cdt Don Walsh, officier de l’U.S. Navy. Après ce record imbattable, le " Trieste I "  fut ensuite modifié, limité à 6 000 mètres, et, sous le nom de Trieste II , fit de nombreuses plongées scientifiques et militaires jusqu’en 1986.

Vous pouvez aussi lire à ce propos les chroniques du 15 et du 25 Juillet !

1955

La mort d’une jeune idole, James Dean, " Le Géant " !

Il est né en 1.931, à Fairmount dans l’Indiana. James Byron Dean suit, en 1950, les cours d’art dramatique de James Withmore, qui y dispense un enseignement anti-conformiste. Il débute à l’écran en faisant de la figuration et tient des rôles de théâtre dans " Sea the Jaguar "  de Richard Wash, et dans " The Immoralist "  d’après Gide.

Elia Kazan le remarque et l’engage pour tourner sous sa direction dans " À l’est d’Eden "  (East of Eden , 1954). La première de ce film fait du jour au lendemain de James Dean une vedette incontestée. En 1955, il tourne " La Fureur de vivre "  (Rebel without a Cause ) de Nicholas Ray et la même année " Géant "  (Giant ) de George Stevens. Une sorte de parenté psychologique unit les trois héros de ces films (Caleb Trask dans " East of Eden " , Jim Stark dans " Rebel without a Cause " , et Jett Rint dans " Giant " ) : "un même complexe du mal-aimé et son corollaire, l’état de fils maudit" (Marceau de Villers).

Le 30 septembre 1955, à l’âge de vingt-quatre ans, James Dean se tuait au volant de sa voiture de sport, dans une course folle " contre la mort ". Trois films seulement avaient suffi à hisser l’acteur au niveau d’une vedette à part entière en passe de devenir une "superstar".

Mort, un autre James Dean allait supplanter le premier : le James Dean mythique. Le véritable culte posthume (cf. The James Dean Story  de Robert Altman) parfois proche de l’hystérie morbide et de l’idolâtrie qui se développa aux États-Unis entre les années cinquante-cinq et soixante trouve son origine dans le fait qu’avec James Dean, et pour la première fois dans l’histoire du cinéma, l’adolescence revendique ses droits et manifeste son identité sur un écran.

Ce faisant, l’acteur rompait avec la conception traditionnelle du héros, du jeune premier du cinéma américain, trop souvent sorte de superman idéalisé ou grand boy-scout au sourire éclatant.

James Dean a bouleversé le jeune public des années cinquante en incarnant un personnage diamétralement opposé : celui de l’adolescent fermé sur lui-même, refusant de jouer le rôle des adultes, en conflit avec le monde parental, mais aspirant farouchement à l’amour et à la tendresse.

On décèle d’ailleurs dans la vérité saisissante de ses interprétations la trace des expériences personnelles de l’acteur. "Il me donnait l’impression d’être un garçon inquiet, a dit Stevens, voué corps et âme à quelque lointain idéal, mais ni lui ni personne n’aurait pu dire en quoi celui-ci consistait. J’éprouvais ce sentiment parce qu’à certaines heures, quand il se laissait aller à méditer, détendu, poussé comme par une nécessité intérieure, à se perdre dans un rêve, une douceur étrange et inconsciente irradiait toute sa personne. À de tels moments et parce que je savais qu’il avait été orphelin dès la prime enfance, j’en arrivais à croire qu’il était toujours en quête de quelque tendresse perdue."

Ses trois uniques rôles lui ont permis de créer un personnage libérateur, à partir d’un style de jeu volontairement anticonventionnel (en cela il suivait la voie ouverte par Marlon Brando, sorte de chef de file des jeunes comédiens américains). "Son jeu contredit cinquante ans de cinéma ; chaque geste, chaque attitude, chaque mimique est une gifle à la tradition. Il est de ceux qui échappent à toutes les règles, à toutes les lois" (François Truffaut).

Vingt ans après, malgré les quelques réserves qu’on peut faire sur le jeu de l’acteur, qui semble parfois dater (surtout lorsqu’il est mal dirigé, comme ce fut le cas dans " Giant " ), James Dean demeure une présence irremplaçable du cinéma américain.

Héros marginal, mi-blouson noir (le premier d’entre eux, d’ailleurs), mi-romantique des temps modernes -"il voulait assumer les aspirations dangereuses et tragiques de notre époque", a dit Nicholas Ray -, James Dean a été un moment dans l’histoire du cinéma, en marquant la fin d’une époque, celle des grandes stars, et le commencement d’une autre, celle des idoles pour la jeunesse.

1986

José Happart, fermier francophone dans une commune francophone, malheureusement située en région flamande, élu légitimement bourgmestre de " Fouron ", est annulé par décision du Conseil d’Etat. Une ignominie de plus, perpétrée par les Flamands, dans la querelle linguistique qui les oppose aux Wallons.

L’actuelle commune de Fouron (4.226 hab. au 1er mars 1991) constitue un des points de fixation du contentieux linguistique en Belgique. Fouron est de tout temps une commune liégeoise, donc wallonne. En 1.963, suite à l’on ne sait trop quel pacte, elle est rattachée à la Flandre, contre l’avis unanime des 95 % des habitants (wallons et flamands) qui la peuplent.

Alors qu’antérieurement le statut linguistique des communes avoisinant la frontière entre régions de langue française et de langue néerlandaise était déterminé par les réponses aux questions relatives à l’usage des langues posées lors du recensement général de la population, une loi du 8 novembre 1962 fixa un nouveau tracé de la frontière linguistique en réalisant, contrairement au projet initial, l’homogénéité linguistique des subdivisions administratives (provinces ou arrondissements) par transfert de communes, quartiers ou hameaux.

Parmi ces transferts, celui des Fourons (à l’époque, six communes distinctes qui seront fusionnées le 1er janvier 1977) de la province wallonne de Liège vers la province flamande de Limbourg suscita le plus de controverses, entraînant dès l’adoption de la loi la démission d’un ministre. Une majorité de la population locale est restée hostile à ce transfert, comme en témoigna à l’époque une consultation organisée par le conseil provincial de Liège et comme en ont témoigné ensuite les résultats des diverses élections.

Une solution de compromis fut esquissée sous la législature 1968-1971  : l’article premier de la Constitution fut révisé de façon à permettre de soustraire une commune ou un groupe de communes à la subdivision du territoire en provinces, et un projet de loi (contresigné par tous les membres du gouvernement de l’époque) appliquant cette disposition au cas fouronnais fut déposé.

Il n’y eut toutefois plus aucune perspective d’application de la formule dès qu’un parlementaire C.V.P. (social-chrétien flamand) annonça que son groupe ne voterait pas le projet. Le problème restait entier, tout en donnant lieu sur place à des incidents trimestriels, lors d’incursions de groupes activistes flamands venant faire régner la terreur dans ce paisible village wallon.

Après les élections communales du 10 octobre 1982, le président de l’Action fouronnaise José Happart, élu sur la liste " Retour à Liège " avec un nombre important de voix (plus de 80 %), fut proposé comme bourgmestre par la majorité (10 conseillers communaux sur 15). La décision tardant, il fut élu premier échevin et appelé à ce titre à exercer les fonctions de bourgmestre. Après de graves dissensions au sein du gouvernement, il fut décidé de nommer José Happart bourgmestre le 31 décembre 1983, date où entra simultanément en fonction un commissaire d’arrondissement adjoint constituant une garantie pour les partis flamands.

José Happart est candidat indépendant sur la liste du Parti socialiste pour les élections européennes de juin 1984 ; il est élu, en tête de tous les candidats francophones, avec près de 235 000 voix. Il rallie ultérieurement le Parti socialiste, tout en lançant un mouvement intitulé Wallonie région d’Europe. Le Conseil d’État fut saisi d’un recours en annulation contre l’arrêté royal de nomination de osé Happart, ainsi que contre ceux de deux bourgmestres de la périphérie bruxelloise, également considérés par les auteurs (flamands) des recours comme ne possédant pas une connaissance suffisante du néerlandais pour exercer leurs fonctions.

Tout en considérant qu’aucune loi n’a érigé l’exigence de connaissances linguistiques en condition d’éligibilité pour les conseillers communaux et en annulant par conséquent l’arrêté de la députation permanente de la province de Limbourg prononçant la déchéance de José Happart de son mandat de conseiller communal, le Conseil d’État annula le 30 septembre 1986 l’arrêté royal le nommant bourgmestre de Fouron, sur la base des réponses qu’il avait fournies au ministre de l’Intérieur à propos de ses connaissances linguistiques.

Du côté flamand, l’arrêt fut accueilli avec faveur et on en demanda l’application immédiate ; du côté francophone, on considéra que le Conseil d’État - et, en l’occurrence, les chambres flamandes qui avaient rendu l’arrêt - était sorti de son rôle en faisant davantage qu’interpréter les textes légaux.

Après de multiples péripéties, on assista à une succession de destitutions et de réélections, cette cascade de décisions contradictoires, que la presse appela le " carrousel fouronnais " ou mieux encore le " hérisson fouronnais ", se poursuivant pendant des mois en mettant plusieurs fois à l’épreuve la stabilité du gouvernement.

En 1988, de nouvelles dispositions légales sont prises et, en application, à Fouron et dans sept autres communes à statut linguistique spécial, les échevins sont élus directement, sur une base proportionnelle (soit, à Fouron, deux partisans de Retour à Liège et un échevin flamand), en même temps que les conseillers communaux en octobre 1988.

La popularité de José Happart ne se dément pas, et il bat son propre record, avec 300.000 voix, aux élections européennes de juin 1989. Dans notre système électoral, 300.000 voix, c’est impressionnant ! En juin 1994, tête de liste du Parti socialiste (au sein duquel il représente une tendance radicale du point de vue social et du point de vue wallon), il obtient 265 000 voix de préférence. Après les élections communales d’octobre 1994, la nomination du bourgmestre à Fouron constitue à nouveau pour le gouvernement un test difficile, imposant de nouveaux aménagements de la réglementation.

La querelle fouronnaise, considérée par certains comme dérisoire, ou pour le moins secondaire du fait de la dimension de la commune, traduit toutefois l’existence d’un fossé infranchissable entre les opinions flamande et francophone. Elle oppose deux logiques : la première considère que l’esprit de la législation linguistique et de ce qu’elle estime comme sa consécration constitutionnelle implique que la charge de bourgmestre et d’échevin ne peut revenir en région flamande qu’à un mandataire faisant preuve d’une connaissance suffisante du néerlandais ; la seconde, en revanche, considère que doit être nommé bourgmestre, à Fouron comme dans les 588 autres communes, le candidat présenté par la majorité du conseil communal.

Fondamentalement, c’est le droit des personnes qui est brimé par le droit du sol. L’état de droit qui est bafoué par la dictature linguistique. C’est la négation des droits acquis de la Révolution Française ! " Les Fourons ", comme on dit à Liège, car il y a plusieurs villages dans cette entité, restent ainsi ce point de fixation du contentieux linguistique, où les deux communautés confrontent leurs conceptions de la coexistence nationale et des fondements de la légitimité démocratique.

Cam.

Mois de Septembre / sommaire des chroniques / sommaire de Camilist


Toutes ces chroniques ont été écrites par Cam (cleclercq@cybernet.be)
Dernière modification le 04/10/98, ©camilist 1998 --- une remarque ?
jrmasson@nordnet.fr !